Roman Polanski's "Rosemary's Baby" de 1968 est une œuvre emblématique du cinéma d'horreur psychologique, se démarquant par sa maîtrise narrative et visuelle. Le film, adapté du roman d'Ira Levin de 1967, excelle dans la création d'une atmosphère de malaise croissant, enveloppant le spectateur dans un monde où la paranoïa et le surnaturel se mêlent habilement à la réalité quotidienne.
La performance de Mia Farrow en tant que Rosemary Woodhouse est remarquable, capturant avec nuance la descente d'une femme dans un cauchemar inimaginable. Son interprétation, à la fois vulnérable et déterminée, constitue l'épine dorsale émotionnelle du film. Les rôles secondaires, notamment ceux de Ruth Gordon et Sidney Blackmer en tant que voisins intrusifs, apportent une dynamique fascinante, mélangeant l'ordinaire et l'inquiétant.
Polanski, en tant que réalisateur et scénariste, fait preuve d'une précision quasi chirurgicale dans la construction de l'intrigue. Chaque scène, chaque dialogue, contribue à une montée progressive de la tension, tout en permettant des interprétations multiples. Cette subtilité est renforcée par une direction artistique et une photographie qui exploitent intelligemment les décors urbains de New York, transformant des espaces familiers en lieux de terreur psychologique.
La bande-son, composée par Krzysztof Komeda, accentue l'ambiance angoissante du film. La berceuse, interprétée par Farrow, reste l'un des morceaux les plus emblématiques et inquiétants du cinéma. Elle illustre parfaitement la capacité du film à perturber et à charmer simultanément.
Cependant, le film n'est pas exempt de certaines faiblesses. Malgré ses qualités, il présente par moments une certaine lenteur dans son rythme, qui peut atténuer l'impact de certaines scènes clés. De plus, bien que le réalisme de l'intrigue soit l'une de ses forces, il arrive que certaines coïncidences scénaristiques paraissent trop commodes pour servir l'avancement de l'histoire.
En définitive, "Rosemary's Baby" demeure un pilier du genre horrifique, un film qui a non seulement défini les standards de l'horreur psychologique mais qui continue d'influencer le cinéma contemporain. Sa réussite réside dans sa capacité à explorer les peurs les plus profondes de l'humanité - la perte de contrôle, la violation de l'intimité, et l'inexplicable - tout en offrant une expérience cinématographique riche et complexe.