Avis sur 2 x 50 ans de cinéma francais

C'est un film que j'ai eu vraiment du mal à trouver, et pourtant dieu sait que je l'ai cherché, et parfois des miracles se produisent. Outre la satisfaction de l'avoir enfin vu, on a là un film qui réuni tout ce que l'on a pu aimer dans Histoire(s) du cinéma ou dans d'autres de ses essais cinématographiques où il parle du cinéma, on retrouve les intertitres, les images qui défilent avec un texte en surimpression, et une musique magnifique en fond, mais je pense avoir préféré ce film à Histoire(s) du cinéma, déjà parce que c'est très concis, ça dure à peine 50 minutes, il y a également les instants poétiques, mais il y a une sorte de constat amer, que les gens ne connaissent pas le cinéma et que les "vieux films" sont destinés à mourir et que ressortir les films pour un anniversaire ça ne les fera pas renaître, qu'il faut les diffuser.
Et je trouve ça très triste, mais également très beau et puis s'en suit une litanie où Piccoli récite le nom d'acteurs méconnu que le public ne connaît pas (et lorsqu'on en reconnaît un il y a un petit frémissement qui nous parcourt de la tête aux pieds, comme quoi on n'est pas totalement inculte), et durant cette scène, on pourrait penser que Piccoli récite le nom de soldats morts au combat, des anonymes.
Et comme toujours, les réflexions de Godard sont fascinantes, sa manière de brusquer Piccoli (est-ce une mise en scène ?) de lui faire comprendre que sa "célébration" est quelque peu inutile, et que quelque part le cinéma est destiné à mourir, c'est vraiment effrayant.
Mais comme pour histoire(s) du cinéma ou ses autres films, pas de long générique avec une liste des références où l'on pourrait piocher pour se faire plaisir, mais ça a le mérite de réveiller (enfin elle n'était pas endormi) mon envie de voir des films et de continuer à découvrir le cinéma, de ne pas laisser ces acteurs, ces réalisateurs et ces films mourir.

Lettre d’amour au cinéma français et de cette richesse culturelle négligée par son exploitation, Godard soulève l’hypocrisie des célébrations à son égard, illustrées par Michel Piccoli alors président d’une association rendant hommage au premier siècle du 7e art en 1995, face à face à coups de réflexions pour tracer les lignes d’un constat, que JLG juge comme accablant, poussant son compère à l’évidence d’une perte.
Toujours dans une certaine démonstration où se chevauchent séquences théâtrales, extraits, images et surexpositions littérales Godard par sa propre voix et celle de Piccoli se montre tout autant passionné qu’acerbe, voire taquin envers la nouvelle génération qu’il voit comme des "pauvres". C’est tout ce côté désabusé qui transpire, "au secours" marmonne Piccoli, "never more", le maître foudroie les consciences et propose sa propre célébration, celle qui met à l’honneur les oubliés ayant donné leurs lettres de noblesse au mouvement cinématographique, du moins comme il le conçoit.
Bien qu’avec une certaine distance je trouve le film un poil réactionnaire je suis obligé de louer la passion de Godard pour son art et la légitimité de son propos, c’est par cette malice des mots et de l’utilisation quasi abstraite des images que la magie opère, empli de nostalgie et de sincérité, la fin est même assez émouvante.