Misanthropes, Dave et Andrew sont de ceux qui souhaitent voir le monde autour d'eux disparaître. Ce qui finit par arriver, les laissant seuls, au milieu d’un néant entièrement blanc qui, selon eux, “ressemble, se ressent et rebondit comme du tofu”, lequel, ironiquement, “n’a le goût de rien”.
Voici donc un bel exemple du type de pensées loufoques parsemant ce long métrage qui ne l’est pas moins et, surtout, surprend, de prime abord, de la part de Vincenzo Natali. Car, après l’excellent “Cube” et le très bon “Cypher”, il aurait semblé logique de le voir poursuivre dans la veine paranoïaque de ses deux précédents films. Mais celui-ci opère un virage à 180 degrés, et nous livre une comédie fantastique aussi étrange que ne l’est son point de départ et qui, à l’écran, ressemble à un “Dumb & Dumber” revu et corrigé par Michel Gondry. Entendez par-là que l’humour potache y côtoie une poésie visuelle née d’effets spéciaux évoquant plus le système D que les pixels, pour un résultat - forcément - atypique. Déconcertant voire agaçant même, lorsque, vers le milieu du récit, Natali se laisse aller à filmer ses deux interprètes en roue libre, avant de redresser la barre. Rarement à court de trouvailles, il ne grille pas toutes ses cartouches dès le début et permet ainsi à son troisième long-métrage de tenir la route, non sans y injecter des thèmes récurrents dans son œuvre, tels que l’enfermement, et l’aliénation qui en découle. Parce que c’est, certes, très amusant, au début, de passer la journée devant la console ou de faire de la musique sans se soucier des voisins, mais au bout d’un moment, Dave et Andrew ont vite fait le tour de leurs occupations, et la solitude commence à leur peser, les rapprochant chaque jour un peu plus du point de rupture, et d’un final plutôt surprenant, à l’image du film lui-même. Car si son postulat laissait craindre le pire, c’est finalement une bonne surprise que ce “Nothing”, qui ressemble à tout ce que l’on veut, mais pas à rien.