A tout casser est un film curieux ! Johnny Halliday à son époque rock pur et dur, Eddie Constantine, l’américain des comédies françaises franchouillardes, John Berry, l’acteur-réalisateur exilé en France à cause de la chasse aux sorcières, autant dire qu’on a là une curiosité du cinéma français ! Oui, mais le résultat est décevant. En fait, le film aurait pu être très fun, mais il fait des choix hasardeux !
Le premier, c’est de faire un fan film ! Ce métrage est clairement tout à la gloire d’Halliday qui joue quasiment son propre rôle ici, chante deux chansons, dont l’une de façon complètement pretexte pendant 3 mn de film qui tombent comme un cheveu sur la soupe, et s’entoure d’un petit groupe totalement impersonnel, hormis dans l’accoutrement clownesque des hippies de cette époque. Halliday est à son prime, le film l’a sous la main, et malheureusement, si ça peut le faire avec un vrai acteur, Halliday ici est encore très mauvais comédien ! Certes il est photogénique, mais il est d’une platitude de jeu assez improbable. Il fait pâle figure face à Michel Serrault qui joue un gangster excentrique qui ne restera pas comme un de ses rôles mémorables mais qu’il porte avec aisance, et même face à Eddie Constantine qui finit clairement par lui voler la vedette dans la seconde partie du métrage. Malheureusement, souvent les films avec des stars en rôle titre mais qui n’est pas un vrai comédien, ça passe pas, et là, c’est le cas. A noter quand même une ravissante Annabella Incontrera en premier rôle féminin qui impose son charme sans être non plus une actrice remarquable.
Le scénario fait lui aussi des choix bizarres. S’il arrive à créer une vraie histoire dans sa seconde partie et même à offrir des gags qui fonctionnent plutôt bien en parodiant l’univers des gangsters et en recourant à l’humour noir, la première partie est décousue et ressemble à un mauvais film des Charlots. Les gags sont balourds, le rythme est inégal, les bagarres sont grotesques, l’univers hippie/blouson noir typique de l’époque a un côté terriblement kitsch qui a vieilli tant ça semble caricatural et pourtant premier degré ! En fait, la première demi-heure au moins du film est franchement peu convaincante et l’on sent que cette partie a été abusivement étendue pour atteindre péniblement l’heure 20 de film. La deuxième partie ne casse pas trois pattes à un canard non plus, c’est un peu répétitif, il y a des gags qui fonctionnent parfois laborieusement, mais au moins c’est construit, et il y a des idées amusantes.
Formellement, je dirai que les scènes d’action sont plutôt bien faites et originales. Il y a notamment une scène un peu « western » dans l’esprit qui s’avère très sympa et qui se déroule dans un cadre original. John Berry réussit son coup, de ce point de vue, mais il faut admettre qu’on sent aussi le manque de budget sur certains points. La boite de nuit du gangster par exemple, elle fait pas établissement chic qui rapporte un max ! Le convoi sécurisé est plutôt léger ! On va dire que ça fait parfois construit de bric et de broc, mais c’était le lot de beaucoup de comédies françaises de cette époque.
Pour ma part, je dirais que ce film, sans être mauvais, est dispensable. C’est une curiosité avant tout, mais l’humour n’est pas très drôle, le rythme est inégal, l’histoire plutôt quelconque. Il y a quelques passages gentillets, mais ça va pas plus loin. C’est un fan film, et hormis pour ceux qui veulent revoir le Johnny de ses débuts dans son propre rôle, il n’y a pas grand intérêt à s’arrêter. 2