Un film qui a très bien vieillit et qui garde toute sa complexité, sa subtilité et sa richesse. La réalisation est très classique, un peu trop académique, mais les plans sont bien cadrés, rigoureux, à l’ancienne, quelques beaux mouvements de caméra. Mais c’est surtout le scénario, original commencé par Costa Gravas et finit par Franco Solinas, qui est très bon. On est à mi-chemin ,entre Kafka, le Carré et A. Christie. Une toile d’araignée infernale se tisse autour du M.Klein/Delon, de ses fils et des pièges sont tendus , on ne comprend pas tout de suite , des leurres nous sont offerts, très belle scène surréaliste dans le château d’Esclimont, avec Jeanne Moreau ( sublime) et tout un groupe d’aristocrates déchus . Toute cette époque de la collaboration et de la délation, bien montrée, mais en finesse, en subtilité, en montrant par exemple simplement un cabaret de Montmartre collaborationniste, avec un juif grimé, et des travestis exploités, et le public collaborateur, qui rigole bien sur une musique des leads de Malher. Le film est dense et aborde en profondeur le thème de l’occupation, ( à noter pratiquement pas de présence des allemands /nazis) de l’identité , de la perte de son image ( très beau plan dans une brasserie parisienne où Alain Delon se voit en double dans un miroir . On a le plaisir de retrouver Juliette Berto , un peu oubliée aujourd’hui, et M. Lonsdale ; formidable de classe. Mais bien sûr le must est Alain Delon qui trouve un rôle sur mesure à sa hauteur : impeccable : dominateur, puis inquiet, puis angoissé et fuyant, de belles sensations jouées, quel acteur énorme , monstre sacré, chapeau l’artiste.