C'est ce qui s'appelle un chef d'oeuvre! Ce grand classique d'Ernst Lubitsch est toujours aussi inoubliable aujourd'hui, d'une finesse incroyable et d'une intelligence inégalable. Quelques scènes sont vraiment hilarantes et on se sent très proche des personnages, particulièrement attachants. De plus, le scénario est très astucieux et James Stewart est formidable. Superbe!
La ressortie de ce film en France dans les années 80 fût un événement. D'ailleurs beaucoup de salles d'art et d'essais ne désemplissaient pas. Un Lubitsch méconnu, qui plus est peut être un de ses tout meilleurs. En tout cas, c'est celui que le réalisateur lui même préférait. A la différence de nombre de ses autres films, qui se passent dans la haute société, celui ci raconte une romance entre deux vendeurs travaillant dans une même boutique au moment des fêtes de Nöel. Pendant toute une partie du film, ils n'arrêtent pas de se chamailler, de se chercher des poux dans le magasin, alors que, parallèlement, ils s'écrivent sans le savoir des mots doux par l'intermédiaire d'une petite annonce sentimentale. Dire que le couple formé par James Stewart et Margaret Sullavan est un des plus forts, des plus attendrissants que le cinéma nous ait donné n'est pas exagéré. Et la description de cette vie dans ce "petit magasin au coin de la rue", ses personnages bien dessinés, incarnés par des seconds rôles qui étaient la marque de fabrique de nombreux films à cette époque. Frank Morgan et Felix Bressart en tête. La "Lubitch touch" se manifeste principalement dans le doigté, le rafinement de sa mise en scène, qui permet de rendre légère, sensible, une intrigue mélodramatique. L'art du quiproquo a rarement eu une meilleure illustration que dans ce chef d'oeuvre, à classer au panthéon du cinéma hollywoodien.
Ayant réalisé plus de 50 films en 30 ans de carrière, Ernst Lubitsch signe son quatorzième film parlant avec « Rendez-Vous » où il nous emmène à Budapest dans une boutique de maroquinerie où deux vendeurs ne s’entendent pas. L’un correspond par petites annonces avec une femme qu’il n’a jamais vue mais il va très vite se rendre compte que celle qu’il aime n’est autre que sa collègue de travail…
Ce qui frappe en premier, c’est la manière dont Lubitsch rend ses personnages attachant, bénéficiant notamment d’une écriture de qualités, fine et intelligente. Il prend le temps de les présenter, de se les faire rencontrer, de filmer des scènes de vies banales ainsi que leurs évolutions et il donne une dimension sentimentale et mélancolique importante à son œuvre. Ce qui les rend encore plus touchant et attachant, c’est qu’on sent que ses personnages sont proches de nous, qu’ils sont fragile et ne savent pas toujours comment s’y prendre. Lubitsch arrive à être toujours juste vis-à-vis à des sentiments, sans jamais tomber dans la lourdeur ou la caricature, il est toujours d’une grande justesse. Il n’hésite pas à user (intelligemment !) de quiproquos ou autres gags en tout genre, faisant souvent mouche.
Si les personnages sont aussi bien réussis, c’est aussi grâce à leurs interprètes. James Stewart est une fois de plus génial, campant à merveille son personnage et Margaret Sullavan lui donne de belle manière la réplique. Pour ma part c’était ma première expérience avec le cinéma de Lubitsch et surement pas la dernière. Il nous livre un film léger, marrant, subtil, attachant, très bien écrit et réalisé et campé par deux acteurs au sommet.
"Rendez-vous" film de 1940 d'Ernst Lubitsch. Agréable comédie ou l'action se passe en Hongrie, à Budapest mais avec quelques invraisemblances à noter : tout d'abord les patronymes des personnages qui ne sont pas hongrois mais polonais et un patronyme russe ! Puis la Hongrie n'est pas un pays slave alors franchement la musique typiquement russe "Les yeux noirs" sortant de la boîte à cigares et cigarettes : les Hongrois ne l'écoutent pas plus que ça ! Les romans de Tolstoï et D : grands écrivains Russes, les Hongrois ne les lisent pas plus que ça ! A ce moment là, il aurait fallu que l'action se passe en Pologne, ça aurait plus logique. L'histoire raconte que le premier vendeur d'un magasin répond à une petite annonce d'une jeune-fille cherchant l'âme soeur. Puis, une correspondance assidue se fait entre eux ou ils s'aiment sans se connaitre. Ce jour là, se pointe dans le magasin une jeune-fille cherchant du travail ou elle réussit à convaincre le patron par son génie de la vente. Entre le premier vendeur et cette nouvelle vendeuse ou le courant ne passe pas ! Puis, un soir, le premier vendeur ayant rendez-vous avec sa mystérieuse correspondante mais malheureusement, son patron le renvoie sans savoir pourquoi et la coïncidence que la jeune vendeuse est rendez-vous avec un homme mystérieux. Elle va dans un café, avec un livre de Tolstoï posé sur la table et attend son amoureux inconnu et là le premier vendeur se pointe, dans le même café ou il a rendez-vous puis comprend à ce moment là, que sa mystérieuse correspondante est la jeune vendeuse. Puis des événements inattendus font que le patron a convoqué un détective qui lui prouve que sa femme le trompe avec un des ses employés qui est Vadas, lui entre en dépression nerveuse puis hospitalisé. Grâce à l'intervention d'un jeune employé, le premier vendeur va voir son ancien patron qui s'excuse car il l'avait soupçonné et le rembauche en tant que gérant. La jeune vendeuse aussi déprime car elle n'a pas de nouvelles de son amoureux inconnu quand avec la visite du premier vendeur coincide avec une lettre. La veille de Noël, ou le chiffre d'affaires explose, la jeune vendeuse prépare son cadeau puis quand le magasin ferme et qu'elle est seule avec le premier vendeur ou elle dit que malgré tout, elle se sent amoureuse de lui et celui-ci lui dit la vérité : ils se mettent à s'embrasser.
Quel beau beau beau film. C'est superbe. Tout y est, l'amour, la tristesse, le désir, l'envie, la douceur et l'émotion. Et ce n'est pas simplement une comédie romantique c'est un chef d'œuvre du cœur
Je t'aime, moi non plus ! Lubitsch signe la plus délicieuse et raffinée des comédies romantiques, à la fois drôle, romanesque et touchante, portée par une interprétation géniale.
Sise dans un contexte social précis cette comédie de mœurs pertinente par son illustration de la délicatesse des rapports avec l'employeur et des divers archétypes d'employés emprunte aux ressorts théâtraux pour dynamiser son récit consacré à la séduction épistolaire éminemment romanesque entre deux individus a priori incompatibles campés par un virevoltant duo servi par des dialogues ciselés. Souriante et touchante cette inspiration de Vous avez un message séduit!
Sympathique film ancien où l'on peut s'évader dans quelques bons sentiments à travers une pièce de théâtre filmée. J'ai apprécié cette fois-ci où les relations entre les personnages qui se cherchent ne se contentent pas d'être unilatérales : James Stewart n'est pas un de ces personnages tombeurs qui obtient qui il veut quand il veut. Ici les relations sont égales. Dommage que cet aspect soit rétroactivement supprimé par cette petite phrase de Madame : "Vous savez, vous avez eu des occasions dans l'arrière boutique, où vous auriez pu faire de moi ce que vous vouliez", remettant à sa place comme il se doit ce qu'un James Stewart doit pouvoir faire dans ses films...
On reconnait tout de suite dans ce film le regard subtil et aiguisé de Lubitsch sur les complexes rapports humains. Le résultat est un film léger mais prenant sur le quotidien des employés d'une boutique hongroise dans les années 1930. Tout y passe : les rapports difficiles entre le propriétaire hargneux et ses employés, les affaires de cœur de chacun... Les scènes cocasses et situations hilarantes s'enchaînent allègrement. Les retournements de situation viennent rappeler que rien n'est jamais figé, que ce que des malentendus ont crée, des éclaircissements peuvent le régler. Les scènes s'enchaînent avec fluidité, les acteurs sont talentueux, et Lubitsch nous régale comme toujours avec sa capacité à tourner en ridicule les travers et faiblesses de ses personnages.
Ils se détestent sur leur lieu de travail mais tombent amoureux l'un de l'autre dans leurs échanges épistolaires anonymes ! C'est un des quiproquos qui fait le sel de cette comédie romantique signée Lubitsch, l'un des plus subtils réalisateurs de l'histoire du cinéma. Presque tourné comme un conte de Noël, ce superbe film se voit avec un plaisir d'autant plus délectable qu'il n'a pas pris une ride ! Outre les saillies d'humour qui ne manquent pas, on remarque dans ce "Rendez-vous" un ton doux-amer alors que le réalisateur s'attarde sur des travailleurs, parle du chômage et de la solitude. C'est cependant l'optimisme bienveillant qui triomphe, un optimisme non sans rappeler les films de Capra et qui dévoile un humanisme incroyable, jamais suranné, toujours élégant. Il faut dire que Lubitsch maîtrise son art : l'air de rien, il met en scène un joli ballet de scènes qui en disent long sur les personnages, manie les ellipses pour mieux servir le récit et offre à ses acteurs d'irrésistibles rôles : le couple formé par James Stewart et Margaret Sullavan, se prenant le bec pour mieux se tomber dans les bras mais aussi Frank Morgan, plus touchant que jamais en patron bafoué mais bienveillant. On ne s'étalera pas sur tout ce qui fait la réussite de ce film humain, drôle et sensible, on préfère vous laisser le découvrir, ça vaut tous les mots du monde.
Avec Frank Capra, Howard Hawks, Billy Wilder, George Cukor, Preston Sturges, Leo McCarey et Gregory la Cava, Ernst Lubitsch est un des maitres de la comédie classique hollywoodienne des années 1930 et 1940, genre dont l'étoile n'a jamais pâli au contraire d'autres comme le western, le film noir ou le film d'épouvante qui ont connu de longues éclipses. Sans doute parce que rire des autres a toujours été une façon détournée de s'accepter soi-même. Ernst Lubtisch était un maitre dans le domaine. Ses comédies enlevées aux dialogues époustouflants mettent en scène princes, duchesses et personnages de la haute société. Quand il quitte la Paramount après en avoir été un temps le directeur de production, il rejoint la MGM avec pour projet d'adapter une pièce de Miklos Laszlo (The shop around the corner). Il doit auparavant mettre en scène "Ninotchka" destiné à relancer la carrière de Greta Garbo en proposant une autre image de l'icône suédoise du studio alors en perte de vitesse. Aidé de son scénariste attitré, Samson Raphaelson, il concocte une comédie intimiste au ton doux amer inspirée du "Kammerspiel" cher à Max Reinhardt qu'il avait côtoyé lors de ses débuts au théâtre à Berlin dans les années 1910. Le report imposé par la MGM lui a permis d'obtenir la participation du couple vedette qu'il désirait composer avec James Stewart et Margaret Sullavan. Le titre américain "La boutique au coin du la rue" donne sans aucun doute une meilleure indication que le titre français ("Rendez-vous") de l'atmosphère du film. L'intrigue se situe à Budapest mais les décors laissent à penser qu'il pourrait s'agir de n'importe quelle grande ville européenne ou américaine, Lubtisch voulant que son propos soit universaliste. Lubitsch qui dans sa jeunesse à Berlin avait travaillé dans le magasin de vêtements de son père est bien sûr très à l'aise pour faire évoluer ses personnages dans un huis clos qui sera tout sauf étouffant. L'arrivée des employés devant le magasin de maroquinerie de Monsieur Matuschek (Frank Morgan) permet à Lubitsch de décrire en moins de cinq minutes la petite communauté qui va interagir autour du duo romantique qui servira de prétexte à l'intrigue. Dans la période de chômage massif qui est celle du film, les employés font corps autour de leur patron quispoiler: derrière un paternalisme bon teint cache l'angoisse d'une comptabilité précaire ajoutée à une situation familiale instable (il soupçonne sa femme de le tromper avec un de ses employés). Surnage au-dessus du lot, Alfred Kralik (James Stewart) l'employé de confiance qui tente par ses analyses froides et acerbes de sortir son patron de la torpeur qui progressivement le gagne pour l'aider à relancer une activité en berne . Lubtisch se fait donc un peu plus grave qu'à l'accoutumée tout en conservant la légèreté habituelle de ses dialogues et la cocasserie qui lui est coutumière dans certaines scènes. Il utilise notamment l'argument imparable du quiproquo qui place Kralik et une des employés récemment recrutée (Margaret Sullavan) en amoureux épistolaires qui s'ignorent alors qu'ils se chamaillent à longueur de journée dans le magasin. Selon une recette éprouvée, le spectateur qui a un temps d'avance sur les personnages attend avec délectation la découverte du pot-aux-roses. En totale maitrise de son art, le réalisateur articule tous les retournements de situation pour nourrir le portrait finement ciselé de chacun des personnages dont il présente les défauts avec la tendresse qu'on lui connait. La petite boule à neige à travers laquelle Lubitsch nous fait observer la vie de la petite échoppe a bien sûr peu à voir avec la réalité mais cette approche que certains jugeront naïve voire lénifiante contribue à réchauffer le cœur notamment en période de crise. Bien avant les autres, Lubistch avait inventé le "feel good movie" en plaçant la barre très haut par le raffinement qui teintait toutes ses entreprises. Inutile dans ses conditions d'insister sur la direction d'acteurs qui en sus de la qualité des personnages permet à chacun d'entre eux de donner le meilleur de lui-même. On nommait cette façon de faire la "Lubitsch Touch".
Ce vaudeville romantique d’Ernst Lubritsch est un petit bijou. La mécanique est fluide, c’est frais, les dialogues sont piquants à souhait et les interprètes attachants.
"The Shop Around the Corner" est l'une des comédies sentimentales de Lubitsch les plus touchantes, sans doute un peu moins bouffonne et déjantée que ses films les plus drôles, mais lestée d'une sorte de véracité humaine, quasi sociologique, plus forte qu'à l'habitude, et ce malgré la théâtralité des situations (une théâtralité qui permet au maître, rappelons-le, de mettre en place ses fameux mécanismes narratifs qui restent toujours aussi ébouriffants, 70 ans plus tard). C'est que le scénario de "The Shop Around the Corner" se déroule dans un Budapest hanté par la misère, le chômage, la peur permanente de perdre son emploi, et les compromis incessants que chacun doit faire avec sa morale pour rester "bien vu" de son patron : il y a nombre de scènes ici où c'est ce petit théâtre-là, dans toute sa cruauté, qui prend le dessus sur l'intrigue romantique, et, en 2011, alors que nous vivons une crise similaire, on ne peut qu'être frappés par l'actualité et le réalisme de cette vision, qui pour être adoucie par l'habituelle générosité Lubitschienne, n'en reste pas moins implacable. Enfin, pour ceux qui collectionneraient les moments les plus "Lubitschiens" de la filmographie du génie autrichien, soulignons la sublime scène du suicide de M. Matuschek, tour de passe-passe d'une folle élégance.