Fort de ses succès dans le domaine du fantastique et de la Science-fiction, le cinéaste britannique, Ridley Scott, entame la décennie 1990 en livrant un Road Trip au féminin, une revisite, dans l’esprit du classique de Dennis Hopper. Ici, ce ne sont pas de motards avides d’expériences et de liberté, embarqués dans une escapade planifiée aux travers des Etats-Unis, mais des femmes quarantenaires éprises d’un bref élan de liberté, partant pour un week-end sans retour, une ballade qui tournera à la débandade. Scott évolue ici dans un terreau qui ne lui est pas encore propre, apprivoisant le genre avec une certaine naïveté, ce qui s’avère finalement positif. S’appuyant sur un tandem féminin de qualité, sur une mise en scène lumineuse, le réalisateur parvient à rendre une copie maintenant culte de ce qui fût à l’époque un projet incertain. Thelma et Louise entre donc au panthéon de ces Road Trip que l’on aime tant, de par l’évasion qu’ils proposent, de par cette fuite en avant si libératrice qu’ils semblent glorifier.
L’effet est garanti, notamment lors d’un final de toute beauté, quoique un brin désuet. Ridley Scott démontre son attachement à un cinéma sans réelles frontières, sans compromis, se construisant sur les seules bases de l’imaginaire, de l’envie et de l’émotion. Quoiqu’on en dise, le réalisateur est bien aidé dans sa tâche par les formidables Susan Sarandon et Geena Davis, deux comédiennes qui trouvent ici le rôle de leurs carrières respectives, à la fois sensibles et fortes, à la fois drôles et touchantes. S’enfonçant toujours d’avantage, les deux femmes compensent leur devenir sinistre par l’humour, la liberté, la criminalité vengeresse et surtout par l’amitié, une amitié infaillible. Alors que le personnage de Louise incarne plutôt la maturité, la rudesse et la rationnalité, celui de Thelma reflète plutôt l’innocence, la folie et la décontraction. A terme, les esprits ne feront plus qu’un. Voilà sans doute la vraie force du film de Ridley Scott.
On soulignera, qui plus est, l’une des toutes premières apparitions de Brad Pitt au cinéma, dans la peau d’un vagabond de charme, plutôt déluré et déjà doté d’un certain charisme. Les apparitions répétées d’Harvey Keitel sont elles aussi croustillantes, l’acteur sachant utiliser correctement le temps qui lui est imparti pour livrer une solide performance, en l’occurrence ici un flic plutôt moraliste. Micheal Madsen, lui, peine d’avantage à laisser son empreinte sur le film, mais cela importe peu.
En définitive, voilà un standard du cinéma qui doit impérativement être vu au moins une fois. Dans la lignée des grandes odes à l’Amérique de la liberté, ici un peu excessive, certes, Thelma et Louise trouve parfaitement sa place. 16/20