Copieusement sifflé au Festival de Cannes, "L'Avventura" donnera paradoxalement à son réalisateur Michelangelo Antonioni une reconnaissance internationale et marque sa collaboration avec sa muse, la sublime Monica Vitti, qui le poursuivra avec "L'Eclipse" et trois autres films.
Avec "L'Avventura", Antonioni donne toute leur froideur aux iles éoliennes, archipel volcanique non loin des cotes italiennes, il ouvre également une des matrices du cinéma moderne, en filmant avec une grande innovation le quotidien presque morbide d'une femme perdue dans sa propre vie, faisant de l'amour un thème de prédilection. Une femme disparait, surement s'est elle suicidée, nait ainsi une romance hésitante et touchée par la grâce, aussi froide que la pâleur des lèvres de cette actrice inoubliable que le réalisateur sublime à grand coup de plans esthétiques particulièrement habiles.
Et sous sa couverture métaphysique et invisible, le silence des âmes en peine, et la mer silencieuse, le future réalisateur de "Blow Up" rompt littéralement avec l'émotion, la place sous une couche de marbre translucide, et la sublime à partir d'un réalisme épatant, presque irréel autant qu'il est glacial, car ici l'air salé et l'urbanisme représenté se sentent en profondeur, tout en savourant la beauté qui passe ici la frontière de la classe imagée.
Malheureusement, même en convaincant les yeux, Antonioni semble volontairement laisser les longueurs exercer son style, et malgré la lenteur forcée du récit, celui ci commence agacer très rapidement, entre les quelque confusions, la complexité de l'écriture et l'explosion de la réflexion, rien est laisser au hasard et les courbes du rythmes atteignent une épaisseur qui n'a rien à envier à la hauteur du Stromboli.
Mais si il est amorcé par l'ennui, "L'Avventura" reste une expérience paradoxalement inoubliable, révélant aux yeux du monde l'un des maitres du cinéma moderne, au service de l'une des plus belles femmes du monde qui éclate ici toute forme de mélancolie. Loin d'un cinéma conventionnel, une aventure irréelle , ennuyeuse autant qu'elle est grandiose.