La suite du grandiose Jesse James d'Henry King fut le premier western tourné par Fritz Lang. Il ré-engage les acteurs des protagonistes du précédent opus, et débute son film par la mort de Jesse, découpant ainsi la légende des frères James en deux parties continues l'une à l'autre. On peut donc considérer cette aventure comme une épopée d'une durée supérieure à 3 heures, matérialisant ainsi l'aura mythique qui entoure ces deux personnages cultes en Amérique. Cette suite appelle Henry Fonda à la barre du rôle-vedette, pour le meilleur car malgré ses différents avec Fritz Lang naît sur le plateau de J'ai le droit de vivre, Fonda livre une prestation d'anthologie en Frank James plus sombre et nuancé que dans le passé. Son apprenti Clément (incarné avec enthousiasme par Jackie Cooper) compose avec lui un de ces duo maître élève que l'on retrouve dans tant de films cultes américains plus récent (Bonnie et Clyde, Luke et Obi-wan, Batman et Robin pour citer quelques exemples connus parmi différents genres). La nouvelle femme jouée par Gene Tierney se montre d'un charisme et d'une importance dépassant amplement celle du Brigand bien-aimé 1939. John Carradine est désormais le méchant au centre du sujet, tant mieux car malgré un temps d'apparition toujours aussi peu élevé, il fait montre d'un horrible dégaine avec son visage émacié de canaille. Enfin, on voit beaucoup plus Henry Hull, et pas seulement pour le voir gesticuler en débitant ses articles de vieux ronchon, ici il va occuper les premières loges lors d'une plaidoirie constituant le clou de ce Retour de Frank James, au cour de laquelle la culpabilité de ce dernier en plein repentir est jugée. Performance à couper le souffle donc, pour Henry Hull chargé de le défendre. Le thème de ce film s'axe sur la justice, l'entrelaçant dangereusement avec la vengeance, et apportant ainsi une vision moins américaine du western. Cela implique davantage de scène posée (la séquence du tribunal dure un bon quart de film) au détriment de l'action, qui se traduit encore par de longues poursuites, que Lang débite à travers des plans de nature magnifique mais l'intensité des combats n'atteint pas la cheville des scènes de King à cause d'un montage trop répétitif. Peu importe, ce qui compte c'est la posée d'enjeux dramatiques, l'amorce de rebondissements, et quelques scènes qui sortent du lot. Justement, parlons en. Il y a principalement une attaque dans un théâtre, surprenant, par son atmosphère et sa précipitation. Et puis il y a le sublime duel final qu'on pensait éjecté, mais qui se déroulera de manière tout à fait inattendue : Lang filme l'intérieur d'une grange, dans le silence, en lui insufflant un brin d’expressionnisme allemand. L'atmosphère est onirique, le suspense a disparu car Frank vient d'entrer, semble t-il, dans un autre monde. Et le tout s'éternise, sans que Frank tire un seul coup de feu. Une véritable touche personnelle qui achève d'arracher ce western de la catégorie des œuvres de qualité (sans toutefois être remarquable) à laquelle il se rattachait.