Trop souvent cantonné au rôle de "pitre" italien dans lequel il a tendance à se complaire, Roberto Benigni a frappé un très grand coup et marqué, à jamais, l’histoire du cinéma avec "La Vie est belle". Et c'est peu dire qu'on a pas vu arriver ce film et qu'on pouvait craindre le pire au vu de son pitch. Difficile, en effet, d'imaginer faire rire sur un sujet aussi sensible que les camps d’extermination nazi... surtout lorsque l'intrigue prévoit la présence d'un gamin et de son père ! Mais, Benigni a eu un éclair de génie en traitant ce sujet sous un angle inédit : le réalisme transcendé par la fantaisie de son héros. "La Vie est belle" est, ainsi, tout sauf une pochade vaguement humoristique qui tournerait en ridicule l'horreur de la Shoah, ni même une parodie. Le sujet traité" interdisait un tel traitement et Benigni l'a bien compris. Ainsi, tous les personnages du film sont fidèles à l'idée qu'on se fait des personnes ayant vécu cette époque terrible... à l'exception du fantasque Guido qui prend le parti de s'amuser de tout pour, au final, mieux survivre et égayer le quotidien de sa famille. Les explications qu'il doit trouver pour expliquer l'inexplicable à son jeune fils (Giorgio Cantarini, formidable), y compris dans les camps de la mort, sont toujours terriblement touchantes par leur innocente naïveté. C'est tout l'intérêt du film qui, jamais, n'élude son sujet (certains moments restent très durs dans ce qu'ils évoquent) mais qui proposent une lecture différente, loin du misérabilisme habituel mais qui n'atténue, en rien, la gravité ambiante.
La scène finale du père vient, d'ailleurs, définitivement rappeler la dureté du film.
Au contraire même, les facéties de ce père qui ne pense qu'à protéger son fils de l'horreur, sont bouleversantes... tout comme, dans une moindre mesure tout de même, son amour pour sa femme (Nicoletta Braschi) sans être pesantes. C'est sans doute le tour de force de "La vie est belle" qui fait partie, à mon sens, des très rares films me paraissant parfaitement incritiquables, au moins sur le plan de son sujet et de son traitement. Tout au ^plus pourra-t-on reprocher au film de s'appesantir un peu trop sur la période précédent l'internement dans les camps... mais ce "défaut" est très certainement dû à l'aura quasi-immédiate du film qui a, surtout, surpris à partir de ce moment. Dès lors, j'ai imaginé que l'intrigue se passait quasi intégralement dans un camp de concentration, ce qui n'est pas le cas et m'a un peu surpris la première fois. Mais, avec le recul, cette longue introduction me parait finalement plus que nécessaire pour, d'une part, proposer un autre terrain de jeu aux héros et, d'autre part, présenter suffisamment les personnages et leur "originalité". "La vie est belle" est, donc, une oeuvre unique débordant d'amour et d'humanité... qu'il convient de faire voir à tout le monde !