Il fallait puiser l'originalité dans la banalité, trouver la lumière dans l'obscurité, la naissance dans la mort, chercher la vie là où l'on pensait l'avoir étouffée. C'est ce souffle étranger et précieux qui émane de cette oeuvre d'Akira Kurosawa, puisant dans sa parodie même l'espoir d'un vrai cinéma, au détour d'une ou deux minutes magiques, courtes, mais qui nous restent en bouche. La grandeur du film réside dans sa préciosité, cette même préciosité qui découle, presque imperceptiblement, de la simple parodie, de l'affrontement guerrier, des cris de colère et de pluie tombante. L'espoir d'une justice et d'une morale, thèmes récurrents chez Kurosawa, est incroyablement couplé d'une perpétuelle métaphore cinématographique, vers laquelle l'on converge sans cesse, sans presque refuser de l'avouer. L'idéal magique réside bien en ce point où le pouvoir de la caméra fait advenir le plein triomphe de la justice et de la bonté, non en se soumettant à lui, mais en tentant d'épouser son mouvement, au risque parfois de perdre le bien, ou de perdre le cinéma. Mais le résultat est bon, le vrai créateur est celui qui se bat sans arme, jouant le jeu de la vie en même temps que celui de la création; et c'est une belle démonstration du courage samouraï que nous livre ici Kurosawa, acceptant de tout sacrifier, pourvu que le résultat triomphe par sa seule générosité, par son seul courage, pour l'amour du risque, pour l'amour de la simple particularité, pour l'amour de l'art (15/20).