Akira Kurosawa est l'un des rares réalisateurs dont j'ai vu plus d'une quinzaine de films et qui ne m'a tout simplement jamais réellement déçu, à une exception de jeunesse près, et ce n'est pas avec Le Garde du Corps, sorti en 1961, juste après Les Salauds dorment en Paix, que cette série va s'arrêter.
Préfigurant Sergio Leone et sa remarquable trilogie du Dollars, Kurosawa nous emmène dans un village à la fin de l'époque Tokugawa, pour y suivre un Ronin qui va se mêler à une guerre de clans. L'une des forces du cinéma de Kurosawa se trouve notamment dans la construction de ses récits, et c'est à nouveau remarquable ici, avec les enjeux et personnages magistralement présentés, permettant de nous y intéresser, puis de nous attacher au protagoniste, personnage complexe et contradiction et mercenaire au grand cœur.
Il brouille d'abord les pistes, avant de donner une dimension plus humaniste à son récit, et de faire évoluer admirablement son protagoniste. Les autres personnages servent cette dimension et évolution et sont, dans l'ensemble, tous bien traités et utiles au récit, alors que Kurosawa démontre un vrai savoir-faire derrière la caméra, on ressent d'ailleurs son influence des westerns, tandis qu'il se montre d'abord d'une grande justesse et sachant passer à l'action dans la dernière partie avec grand brio, pour un final remarquable et mémorable.
En plus de mettre en scène une dimension assez forte, il nous immerge bien au cœur du récit, sachant donner une certaine richesse aux propos et personnages sans pour autant alourdir le récit et gardant son efficacité, comme il a l'habitude de si bien le faire. La reconstitution et la photographie sont soignées tandis que devant la caméra, l'immense Toshiro Mifune écrase tout sur son passage et se montre, à nouveau, remarquable dans le rôle de Samouraï un peu pouilleux qui lui va si bien.
Tout en s'inspirant de ce genre, Akira Kurosawa préfigure les westerns de Leone avec Le Garde du Corps, où il démontre à nouveau tout son talent et savoir-faire, faisant ressortir une dimension humaniste de son récit et surtout un ensemble passionnant et immersif, emmené par un grand Toshiro Mifune.