J'ai lu le livre de Stephen King récemment et j'ai naturellement eu envie de voir le film (en fait c'est plutôt l'inverse : je voulais voir le film mais j'ai décidé de lire le bouquin avant, BREF). Toujours est-il que cette adaptation de Rob Reiner en 1990, 3 ans après avoir adapté Stand By Me du même auteur, est encore une réussite. Et pourtant, ce n'était pas facile, car le bouquin est rédigé à la troisième personne depuis les yeux de Paul Sheldon, et personne d'autre. Le livre insiste donc sur les pensées du personnage, sur tout ce qui lui passe par la tête (la douleur, les idées d'évasion, etc.) qui sont très difficiles à transposer à l'écran sans passer par un système de voix off souvent foireux. L'adaptation est assez réussie même si elle s'éloigne parfois du livre, au détriment de la terreur. En effet, le réalisateur a décidé de nous donner un film sans hémoglobine, très sous-entendu, et le scénario élude aussi quelques passages que j'aurais aimé voir apparaître. Ce choix d'avoir modifié les scènes un peu trop sanglantes est à mon avis une erreur (bien que j'approuve totalement l'idée à la base) car la personnalité démente d'Annie Wilkes en pâtit. Annie paraît (dans le film) beaucoup moins tarée que dans le livre. On sent juste qu'elle a quelques sautes d'humeur, mais elle ne semble pas aussi maléfique que dans l'oeuvre de King. C'est légèrement dommage car c'est quand même dans cette tension et cette forte personnalité que se trouvent tout l'intérêt de l'intrigue. Néanmoins, ça n'empêche pas au personnage du film d'être suffisamment oppressant pour en faire un film de qualité. En matière de film d'angoisse, Misery est définitivement l'un des meilleurs films du genre. Premièrement parce que le scénario est parfait et (à part deux ou trois bricoles) adapté à la lettre de bout en bout, ce qui fait très plaisir à voir et ne procure aucune réelle déception. L'adaptation est fine et bien trouvée et Dieu sait qu'il fallait se creuser pour en arriver à ça. Par exemple, à un moment, Paul a une idée et songe à conserver ses cachets afin d'en donner subrepticement une dose suffisante à sa ravisseuse, pour avoir une chance de s'échapper. Dans le bouquin, Paul pense tout simplement qu'il n'y parviendra pas et que cette tentative est vouée à l'échec. Il abandonne donc l'idée. En lisant le livre, je ne croyais pas que cette petite idée, traversant uniquement l'esprit de Paul, pouvait être bien adaptée. Et pourtant, le réalisateur l'a fait proprement, par l'intérmédiaire d'un "dîner". Quelques libertés ont été ainsi prises afin de pouvoir adapter visuellement ce que Paul pense dans sa tête. C'est extrêmement difficile et c'est un pari qui a été relevé ici avec succès. En ce qui concerne l'adaptation "visuelle", je suis bluffé de voir à quel point les décors ressemblent à l'idée que je m'en étais faite. Les pièces, les personnages et surtout l'ambiance sont très fidèles au livre et j'ai été comblé de ce point de vue. Concernant les acteurs, que dire ? Ils sont tout simplement époustouflants. James Caan interprète Paul Sheldon tel que je l'imaginais, complètement. Il a su s'imprégner du rôle, celui d'un homme qui souffre terriblement mais qui tente constamment de paraître souriant et aimable afin de ne pas froisser sa kidnappeuse. Quand à Kathy Bates, elle est terriblement impressionnante. J'émettais quelques doutes sur ce choix de casting avant de voir le film, mais quelle n'a pas été ma surprise de voir que j'ai parfaitement retrouvé dans son interprétation l'Annie Wilkes du livre. Même si, je l'ai dit, elle ne me paraît pas suffisamment timbrée, ce n'est pas à cause de son jeu d'actrice mais bien à cause des infimes libertés prises par le scénariste William Goldman. Car elle incarne la folie et le lunatisme avec talent, que ce soit la personnalité "de gamine" du personnage (on dirait souvent une petite fille excitée à l'approche de Noël) comme son côté furieux avec les sautes d'humeur impressionnantes qui vont avec. Même sa voix et ses intonations sont conformes au caractère d'Annie et j'ai été ravi. On note également la présence de Lauren Bacall qui fait quelques courtes apparitions dans le rôle de la publiciste de Paul. Quoiqu'il en soit, ce film a été fait avec soin et le résultat est fabuleux, avec un final en beauté. Je ne regrette pas de l'avoir vu, encore moins d'avoir lu le livre de King qui a quand même un sacré talent.