"Le grand jeu" est un film creux. Jacques Feyder et son scénariste Charles Spaak y développent une idée qui, telle quelle, ne présente pas plus d'intérêt romanesque que psychologique. Le cadre de l'histoire, qui plus est, est celui de la Légion étrangère, dont l'exotisme colonial, particulièrement à la mode en cette période du cinéma français, introduit probablement une forme dramatique supplémentaire.
Pierre Martel s'est engagé, fuyant le désohonneur d'une dette. Mais la femme qu'il aime, sorte de demi-mondaine, refuse de le suivre. Au Maroc, il rencontre une jeune femme qui ressemble étrangement à l'ingrate Florence.
Cependant, en quoi cette confusion entre les deux femmes, à moins qu'elles ne soient qu'une
(l'une est par ailleurs aussi brune et aimante que l'autre est blonde et frivole),
constitue-t-elle un sujet fort?
Pierre Richard-Wilm, toujours emphatique, affiche tellement peu ou mal son amour inextinguible que, dès lors, son trouble est insignifiant. La mise en scène est bien trop pauvre (Feyder n'exprime même pas la durée, les cinq années d'éloignement de Martel) pour donner du relief, de la sensibilité au mystère ou à la dimension métaphysique qu'introduit la situation. Autour de Martel, les seconds rôles, parmi lesquels Madame Blanche,
tenancière de la pension et tireuse de cartes (elle annonce son avenir à Martel,
autre effet dramatique suranné) semblent artificiels.