Kenneth Branagh s'est fait connaître sur les planches de théâtre dans les années 80, en particulier pour son rôle de Henry V de Shakespeare. En 1989, il devient réalisateur de cinéma, et choisit tout naturellement d'adapter la pièce qui a propulsé sa carrière d'acteur, tout en y gardant le rôle titre.
Soyez prévenus, il ne s'agit pas d'un film épique ou historique, mais surtout d'une adaptation de Shakespeare. Qui conserve des dialogues originaux, ou tout au moins leur style. Je vous recommande donc chaudement de ne pas découvrir ce film à froid.
Sous peine d'être totalement paumé, il est préférable d'avoir en tête un résumé de la pièce Henry V. Voire des pièces Henry IV, pour bien comprendre le rôle majeur de Falstaff et de ses compagnons, peu montrés à l'écran (même si Branagh a été sympa et a mis des morceaux de Henry IV sous forme de flashback). Evidemment, un bon niveau d'anglais sera impératif, sinon les dialogues vont passeront complètement au-dessus.
Vu les pré-requis, il est peu étonnant que "Henry V" soit peu connu en France, alors qu'il est considéré comme l'une des meilleures adaptations de Shakespeare chez les anglophones. Ca, et parce que le film vise à célébrer la bataille d'Azincourt, défaite française cuisante de la Guerre de Cent Ans...
Pourtant, il sera dommage de passer à côté.
Déjà, les acteurs sont excellents. Certes théâtraux, mais c'est exactement l'intention du réalisateur. Je citerai évidemment Kenneth Branagh, ainsi que beaucoup de têtes devenues connues dans des petits rôles, telles que Judi Dench, Ian Holm, Robbie Coltrane, ou un jeune Christian Bale. Et Emma Thompson, qui incarne la fille du roi Charles VI, qui parle français (!) à l'écran, et cherche à apprendre l'anglais ! De quoi donner deux scènes surréalistes, dont une avec Branagh, son mari de l'époque.
Evidemment, les dialogues valent leur pesant de poésie et de subtilité. Traitant finement d'événements historiques universels, n'ayant pas peu d'injecter de l'humour dans des situations sordides. Shakespeare is Shakespeare.
Je craignais de voir une mise en scène statique venant d'un acteur de théâtre. Mais non, Kenneth Branagh s'en donne à coeur joie. Les intérieurs sont très bien éclairés, et intimistes. Et les extérieurs ont du cachet. Avec évidemment la séquence de la bataille d'Azincourt, pluvieuse et boueuse, qui fonctionne très bien et se termine par un ambitieux plan séquence. En prime, la musique est plutôt jolie !
On aurait donc tort de se priver. Si vous appréciez Shakespeare foncez, si ce n'est pas votre came fuyez !