Ce n‘est qu’après la victoire des alliés à Monte-Casino (18 mai 1944) que la France se découvrit majoritairement une vocation de résistant, cantonnée jusqu’alors à une infime minorité. Les communistes, furent les plus vindicatifs, sans doute pour faire oublier leur collaboration active au régime nazi après le pacte germano-soviétique. Ils organisèrent donc une chasse aux sorcières que montre parfaitement « Uranus ». Le livre de Marcel Aymé, synthèse ironique au vitriol, est adapté inégalement par Claude Berri et sa petite sœur, Arlette Langmann. Le côté ironique et caustique du livre disparaît au profit d’un ton sérieux et sans concession, car c’est connu, on ne plaisante pas avec ces choses là ! Grâce à un casting d’exception chacun des personnages symboliques du livre est parfaitement représenté. Gérard Depardieu, cafetier herculéen, grande gueule alcoolique, qui adore Andromaque de Racine et se pense poète, mais qui déteste les « cocos » et donc de lui reprocher d’avoir servi des boches pendant la guerre. Le fait qu’il avait comme serveur un juif (qui n’était qu’un demi juif et de surcroit son neveu, donc ça ne compte pas) n’est pas une circonstance atténuante. Jean-Pierre Marielle, ingénieur déboussolé, qui croyait au Maréchal Pétain, un héros de la victoire de 1918, qui par humanité donne refuge à un collabo condamné à mort. Philippe Noiret, touchant professeur désabusé par la succession de haines (celle des nazis, celles des FFI), qui se range dans la bonté et le bonheur, qui « n’est pas une recette facile ». Michel Blanc, communiste honnête et humain, qui sent bien que le procès que Daniel Prévost (loin de ses habituelles comédies) au cafetier est un règlement de compte personnel. Mais Fabrice Luchini, l’intellectuel, le penseur de la cellule, que l’on sent absent dans ses actes de la deuxième guerre mondiale, veut un exemple. Sans oublier Michel Galabru, génial dans le rôle d’un sinistre salaud qui a profité du marché noir pour s’enrichir outrageusement en aspirant les économies des petites gens, et que personne n’inquiète, à commencer par les communistes. La scène qui l’oppose à son fils est certainement une des plus dure d’ « Uranus ». Film oublié de nos jours, ce qui est peu étonnant entre des critiques, très majoritairement à gauche et une télévision française du même bord. Malgré quelques réserves sur le jeu outré de Depardieu, le montage inégal et le parti-pris du sérieux (l’humour caustique d’Aymé donnait de la vivacité au propos, alors qu’ici il devient lourd et manichéen), « Uranus » mérite d’être vu.