« Un thé au Sahara », film long, lent, nous narre un rêve éveillé comme doit être le cinéma… De Tanger à Agadez, d’étranges personnages se croisent se séparent, se retrouvent, disparaissent… Un couple : Kit (la femme) et Port Moresby (un nom qui fleure déjà l’aventure : même patronyme qu’une ville de Nouvelle-Guinée !)… Un parasite, un faiseur, Turner qui courtise avec assiduité la femme de Port. Structuré en trois parties sur la base : 3, 2, 1 personnages « Un thé au Sahara » nous narre un cheminement qui conduit de l’illusion du monde civilisé (les plans en noir et blanc de l’introduction) à la désillusion, à l’oubli, au poison existentialiste que représentent les paysages minéraux, linéaires, contrastés du désert et qui soulignent le retour de l’héroïne à la sensualité.
Dans ce film magnifique, qui mériterait d’entrer au panthéon des très grandes œuvres cinématographiques, la beauté des paysages et des peuples n’est pas seulement décorative, un accessoire de mise en situation. Les hôtels boisés du début soulignent le versant psychologique de l’occident si sûr de tout pouvoir affronter. Et au fur et à mesure que le drame prend corps, que les protagonistes sont plongés dans une aventure de plus en plus douloureuse, les paysages deviennent de plus en plus magnifiques, extraordinaires (au plein sens du mot). Et le poids du ciel de protection devient angoisse. La mort serait-elle un voyage vers l’exotisme ?
La fin sublime, est presque celle d’un film muet. Les personnages s’expriment en arabe sans que les images soient sous-titrées. Kit, vêtue de vêtements d’homme, accepte d’être enfermée, prisonnière, pour se livrer à son amant touareg. Retour au physiologique dit Bertolucci ! Et elle sera à son départ livrée de nouveau à l’espace dévorant d’une quête sans but !
Les acteurs sont simplement sublimes ! La BO est exceptionnelle ! Les images inoubliables.
Combien de fois encore regarderons-nous un film aussi plein du rêve cruel d’une vie jouée dans le réel?
GENIAL