Après le très controversé La Passion Du Christ, Mel Gibson passe derrière la caméra pour la quatrième fois et nous offre ce thriller d'aventures chez les mayas...et là, accrochez-vous bien! Parcequ'avec ses paysages à couper le souffle et sa couse-poursuite finale haletante (un morceau de bravoure de près de 45 minutes quand même), Apocalypto s'impose comme le meilleur film d'aventures depuis très longtemps. Là où, avec son Nouveau Monde, Terrence Malick optait pour un naturalisme contemplatif (qui a dit un brin ennuyeux?), Gibson, lui, choisit la manière forte (en même temps c'est pas Martin Riggs pour rien). Au travers d'une réalisation dynamique, constamment en mouvement, il embarque le spectateur dans un déluge de violence et de tension viscérale, traversé par des scènes tour à tour mystiques (comme celle avec la petite fille,un peu flippante, oracle pestiféré qui prédit aux mayas leur chute) ou touchantes (le passage avec la vieille dame dans le marché aux esclaves); et présente une galerie de personnages attachants, émouvants ou détestables (interprétés par de très bons comédiens, tous inconnus, voire non-professionnels). Le réalisateur donne même à son héros (Patte de Jaguar) une dimension mythologique, en faisant de lui une sorte d'Orphée amérindien, obligé de traverser les enfers pour retrouver celle qui l'aime. Et les enfers chez Mel Gibson sont plutôt gratinés, entre sacrifices humains, chasseurs impitoyables et bêtes sauvages, le danger est partout et le héros (et le spectateur avec lui) n'a pas une seconde de répit. Dans le registre de la souffrance du héros, on est pas loin du chemin de croix de La Passion Du Christ (en moins complaisant diront certains). Mais Apocalypto présente un deuxième niveau de lecture, plutôt inattendu chez le réalisateur. En montrant une société Maya inégalitaire, désespérée et au bord du chaos, avec ses mendiants (SDF?) vivants aux alentours de la ville, ses dirigeants corrompus se vautrant dans le luxe et son peuple qui place ses derniers espoirs dans un culte fanatique et sanguinaire, Mel Gibson nous questionne sur l'évolution de nôtre société et les dangers qu'elle encoure. Car c'est bien de fanatisme religieux et d'obscurantisme dont il est question ici, celui qu'on a souvent (à tort ou à raison) taxé d'extremiste présente le fanatisme comme le symptôme d'une société malade (concept très bien résumé par la citation de Will Durant qui ouvre le film). En bref, en signant un film dur, violent, primitif, très éloigné du modèle hollywoodien aséptisé, Mel Gibson confirme son statut de cinéaste choc et sujet à controverses (et c'est tant mieux).