"De la vie des marionnettes", tourné par Bergman en 1980, est une oeuvre à mon sens sous-estimée et que l'on a tendance à un peu trop oublier lorsque qu'on évoque les chefs d'oeuvre (certes, très nombreux) du cinéaste suédois. Il s'agit selon moi d'une des oeuvres les plus maîtrisées de Bergman et, en cela, de l'un de ces 5 ou 6 plus grands films. Contrairement à ce qui a pu être dit, Bergman ici ne cherche pas, d'expérimente pas, il applique. Il construit donc une oeuvre quasi parfaite, exploitant avec brio tout ce qu'il a pu découvrir durant la réalisation de ses précédents opus. Tout, ou presque, y est présent. On retrouve les séquences de rêves surexposées (ici à l'extrême, sur fond entièrement blanc) qui constituent de véritables morceaux d'anthologie, l'utilisation plus qu'évocatrice d'un rouge agressif dans la magistrale scène d'ouverture (on se rappelera de "Cris et chuchotements") laissant place par la suite à un noir et blanc contrasté des mieux venus, une construction fragmentée du récit en différentes séquences introduites par des cartons, une diversité et une richesse incroyable des différents niveaux de narration (voix off, monologue face caméra, narration plus classique, etc). Et tellement plus encore. Je souligne plus particulièrement la séquence où Tim dresse son propre portrait en se fixant dans un miroir. Outre les sommets d'écriture qu'atteint cette scène, elle constitue à mon avis la clé de tout le film, du malaise indicible qu'éprouve le personnage principal et qui le poussera au meutre. C'est en effet ce refus de sa "persona" (pour citer un des plus grands chefs d'oeuvre de Bergman), de ce masque social de Peter qui se révèle être la cause intime de ses angoisses. On reconnaît ici une autre thématique cher au réalisateur. Vous l'aurez compris, malgré sa profonde noirceur, "De la vie des marionnettes" est tout sauf un film mineur de Bergman, l'un des 3 plus grands cinéastes de l'histoire.