Je sors à peine de ce navet et je n'en ai pas cru mes yeux: d'un manga violent, gore, sombre et relativement philosophique (le film est en fait l'OAV Battle Angel ré-édité presque à la virgule près) les Américains ont fait une romance pour ado, un film entre Twilight et Hunger Games où une super-cyborg de combat conçue pour tuer passe plus de temps à vivre une lamentable amourette avec un humain au charisme de brosse à dent qu'à se battre contre des adversaires (ineptes) ou à menacer un quelconque ordre social (ce qui était le sel du manga d'origine). Franchement, j'étais enthousiaste avant de le voir, même si je n'arrivais pas vraiment à imaginer Rodriguez faire un film de ce genre, ça me semblait comme si Godard faisait un American Pie, mais après avoir lu plein de théories assurant qu'ils allaient respecter l'esprit d'origine, qu'on allait surtout totalement éviter d'américaniser le tout, qu'on était fan de mangas, que le but était de respecter l'ambiance, de faire un film adulte et fort, et en sachant surtout que le Boss Cameron était impliqué (quoi que vu le résultat je comprends maintenant qu'il a surtout servi de caution pour les autres producteurs afin de confier le budget à Rodriguez: impossible de croire que James le perfectionniste outrancier ait pu laisser passer un tel échec artistique) j'ai fini par vouloir y croire... Grosse erreur.
Soyons clairs, ce n'est aucunement une adaptation de manga culte, c'est un Marvel à peine déguisé pour plaire au public US plutôt masculin friand de choses pas trop compliquées et de scènes où il peut se fantasmer tout-puissant ("Oh ce qu'elle leur met, ah si je pouvais faire ça avec le dur du bahut!"), mâtiné d'un roman d'amour ado pour plaire aux filles ("Oh ils se sont aimés au premier regard, trop beau!"), mâtiné d'une bonne louche de Disney pour plaire aux petits ("Maman je veux la figurine Alita!" "Oh mais il y a deux figurines: quel corps préfères-tu mon chéri?" "Je veux les deux!"). Le vrai film passe-partout, garanti PG, et ce n'est pas un compliment. Le tout est niais, bien-pensant, abreuvé des thèmes éculés du film américain d'initiation adolescente façon roman dystopique (vis ta vie, trouve ta voie, tu es unique, suis tes rêves, trouve qui tu es, suis tes règles, les jeunes font tout et les adultes sont du decorum), du cliché fleur bleue pour fille moderne (la fille est forte, elle prend sa vie en main, mais elle reste romantique, le garçon lui est faible, ne pense qu'à s'élever socialement sans voir l'amour devant lui et a besoin d'elle) et du film de super-héros américain pour ado façon Marvel (la force est en toi, ce qui compte est qui tu es pas comme tu es, ta différence est ta force, accepte ton pouvoir, ne cherche pas à être comme les autres, les gens t'aiment si tu es comme tu es) ce qui le rend pompeux, verbeux et même agaçant, surtout que même la technique ne sauve pas l'ensemble. Un film en avance sur toute la production comme le clament certains critiques? Que dalle, un Transformer (au hasard) fait aussi bien voire mieux, et le motion capture ne présente aucune avancée notable sauf sa durée.
Le film de plus ne finit pas
(la fin est simplement le début du 2 en somme)
et on ne vibre pas du tout à quoi qu'il se passe
(enfin si, la mort de l'insupportable personnage de Hugo m'a offert une forme de jubilation)
. Non vraiment, rien n'est intéressant et en plus tout est confus, non pas que le scénario soit complexe (la blague...) mais parce que les enjeux sont étonnamment mal présentés! Voilà ce qui arrive quand on confie à un réalisateur de films de gangsters sympas et pas prise de tête (mais également peu profonds) la réalisation d'une oeuvre sérieuse et totalement en dehors de son univers: une grosse blague. L'erreur de casting est absolument criante. Waltz d'ailleurs a de la peine à le cacher, excellent acteur mais visiblement emprunté ici dans un rôle caricatural. L'actrice principale est par contre parfaite, sans qu'on comprenne trop si c'est elle ou l'ordinateur d'ailleurs. La seule bonne scène qui rappelle le manga d'origine dans l'esprit est le moment où Alita se met la peinture de combat de sang, un scène de 20 secondes qui enfin touche quelque chose, est fidèle à l'original, on croit que ça va commencer... ben non. Ah et une autre chose cool:
ne serait-ce pas Edward Norton en Nova? Une bonne nouvelle dans ce marais de mauvaises décisions...
Je précise au passage que le film ne'st pas mauvais qu'en tant qu'adaptation (je précise car comme j'avais lu tout ça à sa sortie et jamais ensuite, ça fait longtemps et je commence à me demander si je ne l'ai pas idéalisé un peu vu le nombre de fans qui le trouvent fidèle à l'original...) il est vraiment mauvais tout court. Une énorme déception.