Votre avis sur La Graine et le mulet ?
4,0
Publiée le 24 mai 2019
L’histoire d’un homme tiraillé comme je les aime, sorte de vieil éléphant à bout de force, fantôme navigant entre deux familles et une administration le laissant sur le bas côté, un dernier rush pour l’honneur et le couscous, le film est construit comme un hommage à la première génération d’immigrés maghrébins se sacrifiant pour leurs enfants, traité avec beaucoup de simplicité et d’honnêteté, alternant moments conviviaux et clivages familiaux. Essentiellement composé d’acteurs amateurs le film cherche avant tout le naturel le plus brut, tel un Pialat ou un Dumont, mais avec un relief social à la Loach en toile de fond, le génie de Kechiche étant de rallonger ses scènes sans que cela ne pèse, laissant éclabousser des instants de vie remarquables, des discussions en cuisine ou en terrasse, aux engueulades, en passant par une séquence de danse suave avec une Hafsia Herzi absolument torride, où tout se jouera sur un quiproquo, jusqu’à son dénouement tragique.
4,5
Publiée le 23 septembre 2019
Abdellatif Kechiche est un metteur en scène désormais reconnu qui sait filmer les hommes dans leur vie quotidienne avec une vérité qui émeut. Ici il choisit de nous montrer l’évolution de la famille algérienne depuis son arrivée massive en France aux abords des années soixante. Pour ce faire, il oppose frontalement un émigrant de la première génération et une gamine de 14 ans parlant avec l’accent marseillais sans renier ses origines profondes. Le vieil homme au bout du rouleau, rejeté de son travail comme de son foyer (pour quelles raisons ?) vit désormais dans une pension où il couche avec la tenancière plus jeune que lui. Il s’est pris d’amitié avec la gamine qui voit en lui le père qu’elle n’a sans doute jamais eu. Sliman (c’est son prénom) va profiter de l’énergie et de l’audace de sa toute jeune « belle-fille » pour se lancer dans un projet fou : ouvrir un restaurant sur le port où il servira le couscous au poisson préparé par son ex-femme. La famille nombreuse de Sliman permet à Kechiche de nous mettre sous les yeux 40 ans d’histoire commune entre la France et l’Algérie. Il nous montre ainsi que quoiqu’en disent certains l’intégration s’est bien réalisée car chacun peut se reconnaître dans un des membres de cette famille hormis les coutumes propres à chaque région ou pays d’origine. Jamais Kechiche n’utilise le racisme pour éclairer son propos ce qui nous renvoie loin des pamphlets violents comme « Dupont Lajoie » ou des drames amoureux comme « Elise ou la vraie vie » utiles en leur temps mais sans doute hors de propos de nos jours hormis pour quelques irréductibles nostalgiques des théories de l’oncle Adolf. Le final nous réserve un suspense haletant qui montre que Kechiche sait aussi utiliser les vieilles recettes des bons polars. Le dénouement est un peu amer mais il marque sans doute la disparition d’une génération ayant payé durement la décolonisation qui se trouve ici jetée aux orties par un des siens. Très beau film .
4,5
Publiée le 17 avril 2022
Une chronique familiale happante, d’une puissance émotionnelle simple et pétrie d’humanité, servie par une direction d’acteurs impressionnante (avec notamment la révélation Hafsia Herzi), et récompensée par le César du meilleur film.
4,5
Publiée le 20 mai 2023
Un film magnifique qui nous porte avec passion.
Kechiche sait nous prendre par la main pour nous faire assister à toute une cérémonie en quelque sorte. Celle de la vie de famille menée de front par les deux filles des deux femmes.
On a une sorte de trio en fait et c'est une course vertigineuse que nous suivons avec une interprétation incroyable et des sentiments forts.
Excellent.
4,5
Publiée le 3 novembre 2023
Ce film est long et lent, et pourtant j'ai été tenu en haleine de bout en bout. Il y a peut être quelques scènes légèrement trop longues, mais dans l'ensemble ça se tient vraiment. Nous sommes parfois à la limite du documentaire façon "Strip tease". Je ne sais pas si les acteurs répètent un texte ou improvisent, mais dans tous les cas ils sont plus que crédibles. L'histoire, très réaliste, devient assez dramatique sur la fin et rappelle la dure réalité de la vie. Une situation inattendue peut engendrer une suite d'événements qui peuvent conduire au pire...
4,0
Publiée le 29 janvier 2023
« La graine et le mulet » de Abdellatif Kechiche (2007) a été largement récompensé à la Mostra de Venise et aux Césars. Nous sommes à Sète où le port thonier est en pleine mutation devenant un port de plaisance. Slimane Beiji (Habib Boufares), 60 ans, y travaille depuis plus de 20 ans à démantibuler les anciens navires mais il se retrouvera au chômage. Père de famille divorcé, il vit avec la patronne d'un hôtel et sa fille, Rym (Hafsia Herzi), mais reste très lié à ses enfants et à son ex-épouse. Avec son indemnité de licenciement, il a l’idée d'ouvrir un restaurant sur un vieux cargo surmonté d’un ancien wagon dans le port de Sète mais le courage lui manque et les obstacles administratifs se multiplient. Finalement avec l’aide de ses 2 familles, il réussira à monter ce projet : 150 couverts sont prévus pour l’inauguration mais la graine de couscous traîne à arriver…
Un film novateur d’une grande fraicheur, basé sur des acteurs non professionnels et qui réussit à créer l’atmosphère d’une famille avec ses moments conviviaux et ses clivages, mêlant la vieillesse désenchantée et respectable, et la jeunesse fougueuse et rêveuse. Le film est souvent tourné caméra à l’épaule et la longue scène avec cette mobylette volée n’est pas sans rappeler Vittorio De Sica.
4,5
Publiée le 21 août 2022
Abdellatif Kechiche réussit un très beau film décrivant l'envie pour une famille maghrébine de s'insérer dans la société française et de réussir. On y découvre à quel point la famille est importante pour les arabes, c'est un socle familiale où l'on mange le couscous tous ensemble. Kechiche a lancé la carrière de Hafsia Herzi, elle a d'ailleurs désormais perdu son accent marseillais de banlieue et son langage en verlan pour un français très correct. Kechiche nous montre avant "Mektoub my love" qu'il aime les formes bien ronde. Pour la scène finale de la danse, il a demandé à Hafsia Herzi de prendre quelques kilos pour avoir des fesses bien plus rondes. Une danse d'ailleurs très sensuelle où le réalisateur se plaît à faire des gros plans de son postérieur. Un très bon film permettant de nous montrer des maghrébins français qui essayent de s'en sortir malgré leurs difficultés.
4,0
Publiée le 6 février 2021
Malgré quelques longueurs (le métrage dure tout de même plus de 2h30 !), Kechiche arrive à capter parfaitement le quotidien des gens du peuple, ceux de basse ou moyenne extraction, avec leurs histoires, leurs amours et leurs galères. On suit notamment celles de Slimane qui, après avoir été remercié après 35 ans de bons et loyaux services dans la réfection de bateaux sur des chantiers navals, essaie contre vents et marées de monter son propre restaurant à l’aide de toute sa famille. On est ici ancré dans le réel de ces Sétois qui trompent leur femme, suent sang et eau après avoir travaillé toute la journée à la criée ou encore font du couscous pour toute une armada. Et puis il y a cette fin formidable avec deux histoires en parallèle qui ont des résolutions différentes plus ou moins heureuses, le tout porté par des acteurs criant de réalisme, nous donnant un beau film social sur le décalage entre générations ! D'ailleurs, on pourrait même trouver dans le titre outre le fait que "la graine" c'est de la semoule et que "le mulet" c'est du poisson qu'on peut mettre dans le couscous, une toute autre explication : la première serait l'avenir qui réside dans les mains des femmes prenant les choses en main et le second symboliserait le côté têtu des hommes, incapables de changer car ce vocable est aussi donné à certains ânes...
4,0
Publiée le 3 février 2020
En 2007, Abdellatif Kechiche confirmait dans son troisième long-métrage son style qui allait faire de lui l’un des cinéastes français les plus marquants des années à venir. Séquences très longues, scènes naturalistes, fascination pour les corps, en particulier les corps des femmes : si certains tics peuvent paraître agaçants, nul doute qu’ils sont la patte d’un réalisateur au style exigeant, obsessif et profondément original. Portée par de très bons comédiens, cette ode à la ville de Sète de près de 2h30 est une chronique familiale et sociétale tour à tour rayonnante et désenchantée sur la vie, l’amitié, l’amour, l’immigration, les rapports de classes, qui oscille constamment entre tendresse et dureté.
4,0
Publiée le 17 décembre 2017
Un film à part, cerné de prix tant pour la réalisation que pour la jeune révélation féminine du film. Un film principalement interprété par des non acteurs ou des acteurs faisant leur première expérience, un film long, totalement ancré dans le réel, avec de longs plans de la vie quotidienne, avec du parler vrai, des regards ,des sourires, des rires, tous profondément authentiques et même des silences, des temps morts, laissés au montage pour des scènes en continu ce qui nuit au rythme, alourdit et allonge le film un peu inutilement mais renforce cette part de vérité et d'émotions très présentes dans le film. Le film tourne autour d'un vieux travailleur immigré d'Afrique du Nord, sans doute de Tunisie, divorcé, en couple avec une compagne qui tient un hôtel modeste avec des chambres pour vieux travailleurs ou retraités dans le même cas, isolés, déracinés mais ayant choisi leur destin en France sans envie ni espoir de retour. La vie s'articule autour et avec sa famille, son ex femme, ses enfants, petits enfants, et autre entourage. Il y a aussi la fille de sa compagne avec sans aucun doute la plus belle relation de tendresse père fille du film. Dans le port de Sete, dans ce milieu des pêcheurs et du port en difficulté financière, dans ce monde en marge, à la limite du seuil de pauvreté ou dedans, une vie s'articule et continue avec ses joies, ses pleurs, ses espoirs. C'est un espoir fou qui va accompagner ce vieil homme fatigué et le film, transformer une vieille épave de bateau en restaurant amarré au port avec comme spécialité le couscous au poisson. Un très beau film, un peu long, des acteurs tous épatants avec en particulier les prestations remarquables de Habib Boufares et de la sublime,belle, talentueuse et maintenant reconnue Hafsia Herzi pour un très beau film d' Abdellatif Kechiche qui hélas souffre d'une fin trop édulcorée, pas totalement claire, pour le coup un peu en queue de poisson.
4,0
Publiée le 20 juin 2018
Les interprètes ne jouent pas, ils vivent leur rôle et c'est saisissant. La fin, tragique, est inattendue alors qu'on pourrait s'attendre à un Happy End mais de cette manière on se sent interpellé. Une petite réserve : certaines longueurs.
4,5
Publiée le 29 décembre 2024
Bonjour tout le monde,


Pour son premier long métrage, Hafsia Herzi commence à marcher vers un destin de comédienne particulièrement exceptionnelle !

Un grand film étonnant et puissant en intensité et en générosité au sujet des personnes humaines prolétaires, authentiques et simples !

Une splendide ode en faveur de la vraie vie quotidienne ici et maintenant et ailleurs !

Qu' en pensez - vous ?

Bien à vous.

Gérard Michel
4,5
Publiée le 8 juin 2023
Une révélation ! Largement primé aux Césars et à Venise, ce film sur les immigrés d’Afrique du Nord de la deuxième génération, tourné caméra au poing avec des acteurs-amateurs, a révélé un metteur en scène de talent et une actrice, Hafsia Herzi, particulièrement convaincante dans la scène où, précisément, elle essaie de persuader sa mère de se rendre au restaurant. Des histoires familiales compliquées et crédibles où le souci des apparences, la fierté, l’honnêteté, les non-dits, les rivalités et les cancans sont de mise. La fin est bouleversante à double titre, certes à cause du vieux mais aussi pour le geste généreux de sa femme. Un film très prometteur rappelant Ken Loach.
Une précision : le mulet du titre est... un poisson qu’on peut mettre dans le couscous.
4,5
Publiée le 25 mai 2023
Sète, le port. Monsieur Beiji, la soixantaine fatiguée, se traîne sur le chantier naval. Père de famille divorcé, s'attachant à rester proche des siens, malgré une histoire familiale de ruptures et de tensions que l'on sent prêtes à se raviver, et que les difficultés financières ne font qu'exacerber, il traverse une période délicate de sa vie où tout semble contribuer à lui faire éprouver un sentiment d'inutilité. Une impression d'échec qui lui pèse depuis quelque temps, et dont il ne songe qu'à sortir en créant sa propre affaire : un restaurant. Seulement, rien n'est moins sûr, car son salaire insuffisant et irrégulier, est loin de lui offrir les moyens de son ambition. Ce qui ne l'empêche pas d'en rêver, d'en parler, en famille notamment. Une famille qui va peu à peu se souder autour d'un projet, devenu pour tous le symbole d'une quête de vie meilleure. Grâce à leur sens de la débrouille, et aux efforts déployés, leur rêve va bientôt voir le jour... Ou, presque...

En fait dans ce résumé tout est dit MAIS c'est surtout le déroulement qui induit à l'attachement et la compassion !
Perso j'en ai lachée une larme.
On ne s'attend pas à ça en lisant le titre, tombée par hasard dessus, émerveillée par ce film tendre et criant de vérité
anonyme
Un visiteur
4,5
Publiée le 9 juillet 2015
Bien rares sont les films qui m'émeuvent au point de me nouer la gorge et de me faire verser une larme. C'est pourtant le cas de celui-ci, probablement grâce à l'ambivalence des émotions qu'il suscite. Le dénouement annoncé, tragique, est pourtant porteur d'espérance et d'optimisme. Quel est la valeur d'une vie ? Dérisoire comme cette course poursuite fatale et sans espoir de la mobylette volée par de jeunes écervelés ou Considérable par la générosité des personnes aimées comme le dévouement de sa fille qui fait l'offrande d'une danse du ventre débridée pour retarder de quelques minutes un dénouement catastrophique. Les acteurs, certes non professionnels servent admirablement ce magnifique scénario.
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