Ce film dégage une poésie étrange et envoûtante, une sorte de vision crépusculaire, avec ce soleil qui se couche sur des amas de fer rouillé, comme sur les ruines d'un monde ancien, ou qui filtre, telle une improbable bénédiction sur l'enfer, à travers les rayons d'une vieille héolienne...
Personellement, je l'ai ressenti comme une métaphore de l'Humanité finissante. Ce sanglier monstrueux et plein de fureur, qui charge sans qu'on puisse l'arrêter dans un monde de décombres et de désespoir (il n y a qu'à voir l'ambiance qui règne en ville et dans l'usine) pourrait symboliser tout à la fois une revanche de la nature sur l'Humanité (sur la quelle elle reprendrait du terrain) et un rejaillissement de l'inconscient humain, maléfique et sauvage, puisque finalement, on ne sait plus très bien qui est la véritable bête : le sanglier ou les deux bouchers ? On a l'impression que ces deux maux se confondent, et alors le porc aussi pourrait aussi être vu comme une incarnation de la barbarie humaine (parcequ'avec la tronche qu'il a, on pourrait supposer qu'il est issu d'une manipulation génétique, ou bien d'une pollution quelqu'onque, etc...).
En tous cas, la conclusion pourraît être que ce monde, que nous croyions avoir domestiqué et élevé à notre image, est en fait en train de revenir à lui et à la sauvagerie des premiers temps. La bête apparaît commme un mauvais présage. Bientôt, il n y aura plus qu'un désert inhumain, dans le quel vivront des bêtes sauvages et meurtrières (qui pourront avoir l'apparence d'un homme sans en avoir l'essence), errant sans autre conviction que celle du carnage et du ressentiment (nature/humanité)... ressentiment aussi pour les impossibles frangins, d'ailleurs, qui n'ont pas l'air d'apprécier la civilisation beaucoup plus que le Razorback.
Et je trouve que tout ça est très bien fait (comment arriver à faire naître beauté et angoisse avec seulement deux balles et un tas de vieux déchets ?), cru et complètement délirant !