Michael Clayton ou l’industrie du gros sous qu’on pourrait apparenter à la bureaucratie du droit américain. Avocat ou faiseur de miracles? Défenseur de la justice ou businessman véreux? Sans approche trépidante, sans arrondissement des angles, Tony Gilroy offre un sincère polar judicaire, vaseux, certes, mais solide. George Clooney en homme de l’ombre, juriste jusqu’au bout des ongles mais dans des domaines bien particuliers. Alors que son cabinet affronte une crise sans précédent, Michael Clayton peut s’avérer être le sauveur mais aussi l’agent destructeur, sans compter sur une vie privée marécageuse et familialement difficile.
Tout est question ici de capital, de revenus, de dettes, de mensonges engendrant d’énormes profits. Lorsque la machine économique d’une multinationale est sur le point d’exploser, faute de divulgations gênantes, pour le moins, le cabinet d’avocats sur le coup sue à grosse goute, d’autant que l’homme défendant la société devant les tribunaux, par remords et folie, retourne sa veste et devient dangereux. A Michael Clayton de faire place nette, de sauver les intérêts de chacun, c’est son métier. Oui, mais les choses s’embourbe, la multinationale prenant maladroitement les devants, déstabilisant un château de cartes fragile comme précieux. C’est vers ce conflit d’affaires que Gilroy nous emmène, aux travers d’un personnage au potentiel cinématographique majeur.
Bien bon nombre auront été déçu par le film, amorphe, lent. Pour d’autres, c’est mon cas, la petite affaire qui nous occupe là est d’une justesse et d’une légitimité profonde. Témoignage fictionnel d’un monde sordide, les dessous d’un système nuancé, sur le fil du rasoir, inconnu du grand public ce qu’il faut pour rester dans l’ombre, pour fonctionner comme une machine à mouvements perpétuels, se moquant de qui mais faisant la lumière sur la comment. A ce titre, les prestations de Clooney, de Tilda Swinton, extraordinaire lorsqu’au bord de la rupture, et de Tom Wilkinson, sont tout simplement énormes. Bref, c’est un film pour acteurs investis et avertis, sans quoi Gilroy n’aurait pu faire vivre un tel récit, certes commun, mais tout bonnement captivant.
Un film malaimé, mal compris peut-être. Un film subtil et malgré tout intense, récompensé de manière discutable cependant. Enfin si l’envie vous prend de vous creuser un poil la tête devant un film sérieux et bien mis en scène, produit par Soderbergh et Clooney, naturellement, presque jamais l’un sans l’autre, et réaliser par un réalisateur chevronné, Michael Clayton est pour vous. 15/20