Ah, si ce film avait été muet ! Plus de ces dialogues creux où lon refait le monde avec des sentences définitives, de phrases originales comme: « On choisit ses amis, pas sa famille », de cours de morale léger comme le plomb contre lhomophobie. Plus de ces scènes de repas, interminables et cacophoniques, avec caquetage et babillage obligé. Uniquement de belles images : racines darbres tortueuses, homme nu nageant la brasse, ou endormi sur une plaque de verre, danseurs parfaits, lettres sur un mur (oublions le rideau...) : libre à nous dinterpréter, rien ne nous aurait été imposé. Mais Zabou Breitman se veut si démonstrative, prête des paroles si convenues à ses personnages, que lon se désintéresse de ces archétypes taillés sur mesure pour véhiculer une thèse, jusquà nous infliger le cliché du beau-frère obèse et violeur. Mais si ce film avait été muet, nous laissant méditer sur les symboles, nous naurions pu être émus par le désespoir de Léa /Fred, dont le monologue halluciné, instinctif, nous prend aux tripes. Seul personnage qui respire la vérité, victime de ce qui défie la raison, elle erre, tentée par la mort, qui semble gagner même les scènes damour, si laides, si « techniques ». Ce qui noue les relations entre Frédéric et Hugo reste abstrait, éloigné. Et le déroulement haché de la scène- clef devant la maison ne permet pas de sidentifier à eux. Une scène traduit parfaitement le malentendu entre la réalisatrice et le spectateur : à lhôpital ce qui est censé susciter la compassion devient ridicule, tellement lattitude soudaine dHugo (réflexe dégocentrique ou sursaut dun homme qui se remémore avoir tenu des discours moralisateurs ?) provoque le recul. Je salue tout de même la délicatesse des sentiments mère-fils formant un cocon protecteur, et ce joli personnage denfant, qui instinctivement a tout compris.