Le nouveau film de Zabou Breitman est une étrange expérience. Difficile de mettre des mots sur Lhomme de sa vie tant le film lui-même nest quun amas de sensations. La mise en scène, atout majeur mais destructeur du film, est extrêmement travaillée : chaque plan est soigné, inventif et incroyablement maîtrisé. Indéniablement, le film est dune grande qualité cinématographique.
Paradoxalement, cest cette même réalisation stylisée à lextrême qui ralentit le film, atténue son impact et freine gravement lémotion. Alors que chaque acteur est parfait (Campan formidable, Drucker éblouissante, Berling très juste), quelque chose empêche lémotion de jaillir de la quasi perfection des plans. La lourdeur des symbolismes ? Les dialogues trop écrits ? Le jeu qui sinstaure avec le public à travers une mise en scène presque ludique? Rien nexplique pourquoi Lhomme de sa vie natteint pas sa cible : le cur. Pénalisé par sa complexité, son côté trop « intellectuel », le film provoque une amère et désagréable sensation : le malaise. Senfonçant peu à peu dans la noirceur du récit (on frôle le glauque par moments), le spectateur a constamment le sentiment de se trouver dans la peau dun voyeur contraint de regarder des choses trop enfouies, trop personnelles
Le plus dérangeant dans ce film, cest quil est parfaitement impudique, frontal, brutal. Reconnaissons que cest tout de même un challenge de réussir telle mission !Malheureusement, le plaisir quelle a pris à le réaliser nest peut être pas le même que celui du spectateur, oppressé, malmené, devant tant de richesse. Car il y a trop de choses dans ce film : on en ressort la tête retournée, trop pleine mais finalement si vide
Car trop de sentiments tue le sentiment. Zabou, en accumulant des couches et des couches de choses à dire (et à montrer) finit par perdre lessentiel, la simplicité, la beauté dune contemplation sauvage, et peut-être même, au final, la sincérité.