99 francs est un Jan Kounen qui ne laissera, comme l’ensemble du cinéma de ce réalisateur, pas indifférent. Pour ma part, si j’ai apprécié le propos critique, et si j’ai trouvé un vrai sens visuel de la part de Kounen, 99 francs reste malheureusement trop foutraque et décousu pour n’être autre chose qu’un pamphlet comique trop lourdaud pour être offensif.
C’est dommage, en fait. Kounen, un peu comme de coutume dirai-je, se noie de lui-même dans une multitude d’excès qui donnent à 99 francs une impression de grand bazar au propos difficilement perceptible. De nombreuses scènes ne servent manifestement pas à grand-chose, la narration est outrageusement alambiquée, et à force de se vouloir transgressif ou incisif, le film en oublie souvent le propos critique engagé et dénonciateur. Si les films tombent souvent dans le didactisme et le message moralisateur (ou pas !) au détriment de la dimension esthétique, ici ce serait plutôt l’inverse, Kounen ne manquant pas d’imagination, mais sacrifiant la force du propos à cette tendance à l’excès visuel. Et la partie centrale accuse quand même une vraie baisse d’intérêt, où l’on s’englue spécialement dans les amours féminins du héros !
La forme est cependant peu critiquable. Si la mise en scène nuit clairement à la compréhension du fond, il y a, malgré tout, beaucoup d’originalité, d’inventivité, et les effets de style, en général, sont bien employés. Le travail sur la photographie, les décors est bon, avec de vrais contrastes d’ambiances, et une séquence d’ouverture qui, à mon sens, pose bien la qualité du travail de Kounen. Ce dernier rend aussi un bel hommage aux physiques sculpturaux de Vahina Giocante et d’Elisa Tovati ! Il filme fort bien les femmes, c’est indéniable ! Je reste juste sceptique, à un moment donné, sur les intégrations bandes dessinées. En plus elle se superpose à un passage narrativement inutile, si bien que pour le coup j’ai eu l’impression que Kounen ne souhaitait que se faire plaisir. A souligner aussi une très bonne bande son, où l’on reconnaitra de nombreux morceaux connus.
Le casting est plaisant, mené par un Jean Dujardin à l’aise dans ce rôle, et épaulé par des acteurs de qualité, notamment un duo féminin de charme, exploité surtout pour son physique cependant. Côté masculin, Jocelyn Quivrin, Patrick Mille, entre autres, pour camper des personnages qui, autant que celui de Dujardin, sont pour le moins antipathiques la plupart du temps. Ceux qui aiment pouvoir s’attacher à un héros, auront peut-être du mal ici, même si le talent est là.
De toute manières, 99 francs ne se veut pas un film attachant. Dénonçant de façon volontiers trash les pratiques du monde de la pub, c’est un métrage qui l’est, trash, mais qui finalement, et en dépit de passages vraiment réussis, retranscrit plus l’esthétique de Kounen que le propos de Betbeder. Pas inintéressant, reste que ce délire parfois vulgaire, parfois drôle, souvent foutraque, n’a pas vraiment l’impact attendu. C’est néanmoins une tentative originale, et loin d’être dépourvu d’atouts, et je lui donne 3.