Avec Shanghai dreams, le réalisateur Wang Xiaoshuai a voulu aborder une période précise de l'Histoire chinoise contemporaine, celle du du début des années 80, deux décennies après que le gouvernement, craignant un conflit avec l'Union Soviétique, eut demandé aux usines les plus importantes stratégiquement de s'installer à l'intérieur du pays pour y former une "troisième ligne de défense." Le film parle de ces ouvriers déracinés ayant l'espoir de pouvoir retourner vivre dans les grandes villes qu'ils avaient quittées...
Le réalisateur Wang Xiaoshuai explique que Shanghai dreams est inspiré de sa propre enfance : "Ce film est ancré dans mes souvenirs. J'ai passé toute ma jeunesse dans une région rurale. Comme la famille de Qinghong, nous avons quitté Shanghai pour aller vivre dans la province de Guizhou car l'usine où travaillait ma mère avait été déplacée là-bas. (...) J'éprouve aujourd'hui encore des sentiments très forts envers l'endroit où j'ai grandi et envers ceux qui y vivaient, surtout ceux qui, comme ma famille, venaient de Shanghai. (...) Cela faisait longtemps que je voulais réaliser ce film. Il est dédié à mes parents et à tous ceux, innombrables, qui ont connu le même destin qu'eux."
Wang Xiaoshuai explique pourquoi il a appelé le personnage principal de Shanghai dreams Qinghong (Qinghong qui est aussi le titre original du long-métrage) : "J'ai choisi ce nom car il refète très bien cette époque. Qing, c'est le vert, cela représente la naïveté des gens, leur gentillesse, leur désir de survie. Et cela contraste violemment avec les choses anormales que les gens ont pu être amenés à faire dans ces années-là."
Pour que Shanghai dremas soit authentique, le tournage s'est effectué dans la région de Guizhou, cette même région dans laquelle le réalisateur Wang Xiaoshuai s'était installé avec sa famille dans les années 60. Le cinéaste explique : "La principale difficulté a été de s'entendre avec les chefs de l'usine où nous tournions, un endroit où l'on fabrique des armes. Ile ne comprenaient pas ce que nous filmions, ils craignaient qu'on donne une image négative de leur usine délabrée et de la façon dont les ouvriers y travaillent. Nous avons également beaucoup parlé avec les habitants, afin de leur expliquer que nous ne venions pas les juger, bien au contraire, que nous voulions parler d'eux parce que nous étions aussi des "locaux". Puis il y a eu de nombreux problèmes logistiques et pratiques : des problèmes de décors, d'autorisation de tournage, de budget, et même de météo. Ce fut mon tournage le plus difficile."
Shanghai dreams a obtenu le Prix du Jury au Festival de Cannes 2005.
Le réalisateur Wang Xiaoshuai, qui est passé du statut d'artiste underground à celui de cinéaste reconnu et apprécié dans le monde entier, jouit d'une position intéressante pour donner son point de vue sur l'évolution du cinéma chinois et, au-delà, sur la société chinoise contemporaine : "Je crois que, tout simplement, les choses ont évoluées dans le bon sens dans l'industrie chinoise du cinéma. Les autorités semblent respecter mes intentions et j'ai pu travailler maintenant comme je le faisais avant. Il y a quelques années, on me reprochait de trop insister dans mes films sur les comportements individuels, mais je n'entends plus cela à présent. Je crois que notre société est plus consciente de l'importance des pensées individuelles, des sentiments, des comportements, et je trouve normal qu'on fasse confiance aux artistes, qu'on les laisse utiliser leur propre perspective pour exprimer leur vision de la société et de la façon dont celle-ci évolue."