Dans les années 60, des familles chinoises ont été priées (le mot est faible) de quitter leur ville d'origine et d'aller habiter à la campagne, où des usines s'installaient. Cela faisait partie d'une politique de décentralisation de l'industrie. Ce film chinois, non interdit dans son pays, revient sur cette période, ou mieux encore sur ce qu'il se passe quelques années après, lorsque les adultes voudraient revenir à la ville, et que leurs enfants, élevés dans les villages, ne savent pas d'où ils sont. Problème typiquement chinois ? Certainement pas, le film aborde le thème du déracinement, universel... Les rapports avec les vrais villageois, les mirages de la ville lointaine, les errements de la "seconde génération", tout ceci est finement observé, et la description de la jeunesse en manque de repères paraît crédible. Ce qui l'est un peu moins, c'est le destin particulier d'une famille, brisée par cet écartèlement et par la rigidité du père qui ne supporte pas que sa fille veuille s'amuser. L'histoire est un peu lourde, démonstrative. La mise en scène hésite entre un classicisme neutre et une tendance à laisser durer les scènes, pour faire "auteur" ?
Par ailleurs, le personnage principal, celui de la fille brimée par son père, ne se révolte pas, comme écrasée non pas par les hommes, mais par une destinée à laquelle on ne peut rien opposer.
On sort du film avec un certain malaise : à aucun moment les responsabilités des autorités chinoises de l'époque ne sont clairement dénoncées, et l'aspect politique et social est noyé sous le drame humain un peu factice.