Dreamgirls : les secrets du tournage

Dreamgirls a reçu deux Oscars en 2007, celui du meilleur son et celui de la meilleure actrice dans un second rôle pour Jennifer Hudson. Il a été nommé dans plusieurs autres catégories : meilleur acteur dans un second rôle pour Eddie Murphy, meilleurs décors, meilleurs costumes, ainsi que deux nominations pour la meilleure chanson. Par ailleurs, le film a reçu le Golden Globe 2007 de la meilleure comédie, Eddie Murphy celui du meilleur acteur dans un second rôle, tout comme Jennifer Hudson qui a reçu l'équivalent féminin. En plus de son Golden Globe, cette dernière a également reçu le Bafta et le Screen Actor Guild dans la même catégorie.

Dreamgirls est l'adaptation d'un spectacle musical de Broadway retraçant l'histoire du groupe The Supremes et de la compagnie de disque Motown Records. En 1980, Warner Bros Pictures, a acquis les droits de Dreamgirls et voulait engager Withney Houston pour jouer le rôle de Deena. La production a abandonné le projet, car la chanteuse exigeait de chanter aussi les chansons d'Effy, un des personnages principaux du film. Warner Bros Pictures relance la production en 1990, avec Lauren Hill au casting et Joel Schumacher à la direction du film. Second échec. Finalement, le studio arrête le projet à cause de l'insuccès du biopic Why Do Fools Fall in Love ?

Laurence Mark, le producteur de Dreamgirls avait rencontré Bill Condon, le scénariste de Chicago, qui rêvait d'adapter ce projet à l'écran. Cependant, les droits appartenaient depuis plusieurs décennies au producteur David Geffen, l'un des fondateurs de DreamWorks. Laurence Mark a alors appelé ce dernier pour obtenir les droits. Il raconte : "David a pris un bon quart d'heure pour m'expliquer très gentiment que ce film ne verrait jamais le jour parce que c'était beaucoup trop casse-gueule. En outre, il se sentirait personnellement responsable de cet échec pour avoir terni la légende de "Dreamgirls" et fait de l'ombre à la réputation de Michael Bennett. Je lui ai répondu que je comprenais et respectais son point de vue, mais j'ai insisté pour qu'il rencontre Bill. David nous a invités à déjeuner dès le lendemain. Entre la poire et le fromage, Bill a pu lui expliquer son approche, et David a tout de suite dit : "Cela me paraît jouable.". "

Le réalisateur et le scénariste du film Bill Condon avait une idée précise du scénario. L'action devait se situer pendant les mouvements des droits civils américains. Il a intégré des éléments socio-politiques de l'époque, comme le célèbre discours I have a dream de Martin Luther King et la marche pacifiste à Washington.

Beyoncé Knowles, Jamie Foxx, Eddie Murphy, Danny Glover ... tous réunis à l'affiche de Dreamgirls. La chanteuse Beyoncé Knowles, fan du spectacle musical de Dreamgirls, s'est présentée à l'audition et a été prise pour interpréter le rôle de la diva de la soul Diana Ross. Quant à Jamie Foxx, il a refusé au départ de jouer le rôle de Curtis Taylor, car le salaire ne lui correspondait pas. Mais dès qu'il a appris que Eddie Murphy et Beyoncé Knowles faisaient partie du casting, l'acteur a finalement changé d'avis. Pour choisir l'actrice qui devait incarner le rôle d'Effy, les producteurs ont auditionné 783 filles, et ont retenu Jennifer Hudson, l'une des finalistes de l'émission de télé réalité American Idol aux Etats-Unis.

La première représentation de la comédie musicale éponyme eut lieu à l'Imperial Theatre de Broadway le 20 décembre 1981. Le succès fut fulgurant et il resta à l'affiche près de quatre années, avec un total de 1521 représentations. Il fut primé aux Tony Awards en 1982, remportant six récompenses : meilleur livret, meilleure chorégraphie, meilleur acteur, meilleure actrice, meilleur acteur secondaire et meilleurs éclairages. Dans les années quatre-vingt, la comédie musicale entama une tournée aux Etats-Unis et dans le monde, passant par les plus grandes villes dont Berlin, Paris et Toronto.

Le réalisateur du film, Bill Condon, a assisté la première de la comédie musicale en 1981. Il s'en souvient : "c'est une expérience que je ne suis pas près d'oublier. Cette production était fascinante, avec son casting de rêve et sa légendaire mise en scène de Michael Bennett. Vingt-cinq ans plus tard, nous pouvons envisager une nouvelle approche de ce matériau qui a gardé toute sa pertinence. La fulgurante percée de la musique afro-américaine dans les années soixante nous captive d'autant plus que le courant black est devenu une référence culturelle centrale."

Interprète de You cant' hurry love, Baby Love, Upside Down..., Diana Ross est une personnalité incontournable de la soul. Son groupe The Primettes signe en 1960 un contrat avec Motown, une compagnie de disques américaine qui a engagé les plus belles voix de la soul et du rhythm and blues (Marvin Gaye, Stevie Wonder, The Temptations...). Le groupe est alors rebaptisé The Supremes, et devient en 1967 Diana Ross & the Supremes, en raison du succés grandissant de la chanteuse. Elle quitte le groupe en 1969, pour entamer une carrière en solo avec triomphe, puisque sa chanson Ain't No Mountain High Enough est classée numéro un en 1970.

Beyoncé Knowles revient sur les illusions que le public peut avoir sur les artistes, et sur la façon dont ils en sont arrivés là : "Lorsque les gens entendent le mot "rêve", ils pensent "gloire", "beauté", "succès", et oublient les douleurs et les sacrifices qu'il entraîne. Il se passe des tas de choses compliquées au long d'une vie d'artiste. Nous les évoquons toutes dans ce film. Mais l'important, bien sûr, est de faire aboutir son rêve, et pour nous, le tournage de Dreamgirls a été... un pur rêve."

Eddie Murphy interprète James "Thunder" Early, chanteur et star locale. A propos de son personnage, il confie : "Jimmy est toujours à deux doigts d'exploser, d'entreprendre la tournée des grandes villes et de se faire connaître à l'échelle nationale. Chacun l'aime parce qu'il n'a pas son pareil. Il n'arrive pas vraiment à percer, mais il fait partie de ces créateurs du R & B qui amènent aux jeunes blancs des musiques et des rythmes sur lesquels ils peuvent danser. Il rappelle à cet égard James Brown, Chuck Berry ou Little Richard, tous ces musiciens qui ont contribué à l'unification d'une Amérique encore ségrégée, et qui n'ont compris que beaucoup plus tard ce qu'ils avaient accompli."

Afin de mieux interpréter son personnage, Beyoncé Knowles a été obligée de "s'effacer", car son personnage évolue tout au long du film. Elle explique : "Son style musical étant très différent du mien, j'ai dû me retenir de chanter à pleine voix, mettre du mystère, des nuances et de la délicatesse dans son comportement. Mais le public aura un choc s'il s'attend à voir Beyoncé, car elle n'est nulle part dans ce film !"

En plus des numéros issus du spectacle original, Bill Condon a souhaité intégrer de nouvelles chansons. Pour cela, il a fait appel à Henry Krieger, compositeur de la comédie musicale. Ce dernier a créé à cette occasion quatre nouvelles chansons : I Love You, I Do ; Listen ; Patience et Perfect World. A ce sujet, il confie : "L'occasion m'a été donnée de revivre un rêve commencé il y a vingt-cinq ans. Le show a été scrupuleusement respecté, mais le film possède aussi une identité propre, une "vibration" qui vient à la qualité de son scénario et de sa mise en scène, à l'apport des musiciens. Le résultat forme un tout très organique. J'adore !"

Dans le film, ce sont réellement les acteurs qui chantent. Pour cela, ils se sont entraînés durant quatre semaines avec des superviseurs musicaux. L'un d'entre eux, Matt Sullivan, raconte son expérience avec les principaux interprètes : "Eddie s'est pointé en étant lui-même et, en l'espace de quelques secondes, s'est transformé en James "Thunder" Early, avec une voix toute différente de la sienne, qu'il avait soigneusement mise au point. C'était tout aussi fascinant d'assister à la métamorphose vocale de Beyoncé et de voir comment elle s'adaptait à la tessiture de Deena. Quant à Jamie, c'est un fabuleux acteur doté d'une voix étonnante. Il a mis dans son interprétation un feeling qui nous a tous emballés."