"Flyboys" a un double intérêt. Tout d’abord, du fait qu’il s’appuie sur des faits historiques bien réels, on apprend des choses, comme l’existence de cette escadrille Lafayette, constituée en grande partie de jeunes soldats américains venus prêter main forte bien avant que leur propre patrie entre dans le conflit. J’ai beau me creuser la cervelle, je ne me souviens pas que ce genre de détail ait été enseigné en cours d’histoire. L’autre intérêt réside dans les prises de vue, alors que les aéroplanes ne sont encore qu’une invention toute récente, et déjà on ne peut que constater l’immense pouvoir de créativité des ingénieurs pour concevoir des avions plus sûrs, plus maniables, et plus rapides. Ainsi nous voyons la formidable opposition des biplans français aux fameux triplans allemands. Et quand on voit leur architecture, on doit reconnaître que les pilotes étaient dotés d’un sacré courage pour oser défier les lois de la gravité en se transformant en de véritables funambules. Et c’est en partie en cela que les prises de vue sont intéressantes : malgré des contraintes de portance poussées à leur paroxysme, les avions paraissent frêles, révélant toute leur fragilité, notamment lorsque leur structure est mise à mal par les salves de projectiles. Bien qu’on voit que certaines séquences, en particulier les gros plans sur les pilotes, ont été tournées en studio, quel rendu dans les combats aériens ! Notamment lors de l’attaque du Zeppelin, ballon dirigeable développé par les allemands. Les avions s’affrontent se croisent, se suivent, se font face à face, se surplombent, au prix de grandes boucles serrées, et manquent de se percuter à chaque seconde, réduisant l’espace aérien à un véritable mouchoir de poche dès lors qu’il est utilisé en champ de bataille. En vrais funambules, les pilotes les plus doués deviennent des légendes, comme le fameux Faucon noir (en vérité un as des as de l’aviation de chasse allemande lors de la Seconde Guerre Mondiale) ou le célèbre Baron rouge (pas du tout évoqué), ce dernier étant lui aussi porté à l’écran par l’intermédiaire d’un autre film se nommant "Baron rouge". Pour ce qui est de la réalisation, il n’y a pas grand-chose à dire, si on excepte les nombreuses erreurs historiques : c’est très correct, et les 140 minutes passent assez vite. On peut cependant reprocher une certaine convenance dans le déroulé du scénario, mais je rappelle que le film est basé sur des faits réels. "Flyboys" comporte également quelques clichés, comme l’héroïsme et une certaine arrogance, mais je pense que ce sont des qualités incontournables pour être pilote, notamment en un temps où l’aviation n’en est encore qu’à ses balbutiements alors qu’elle est déjà promue comme une arme d’ordre tactique, malgré le fait qu’elle n’était pas encore considérée comme un instrument de combat avant la Grande Guerre. Pour revenir sur l’héroïsme, il est cependant un peu écorné avec ce pilote cloué au sol par ses peurs. Le récit est romancé, et nous gratifie d’une amourette dont bon nombre d’internautes cinéphiles se demandent comme moi ce qu’elle vient faire là-dedans. Car elle n’apporte pas grand-chose au propos, d’autant plus que le personnage principal est purement fictif, tout comme la plupart des autres, excepté le capitaine. C’est dommage, j’aurai aimé un peu plus d’exactitude dans les faits historiques relatifs aux pilotes, même si on voit effectivement le premier et unique pilote de chasse noir de toute la Première Guerre Mondiale, pilote dont seul le prénom a été gardé. Quant au casting, James Franco rend une copie honorable, même si je le trouve un peu fade au niveau de la bravoure. Pour ce qui est des sentiments vis-à-vis des pilotes morts au combat ou de Lucienne, il est davantage convaincant. En parlant de Lucienne, son interprète suscite des avis controversés. Eh bien je dirai qu’elle n’est pas si mal que ça, puisqu’elle parvient à refléter un personnage marqué et qui ne veut pas s’autoriser le moindre sentiment, à plus forte raison envers un pilote de chasse dont l'espérance de vie est par définition très courte. La surprise vient de Jean Reno, que je n’attendais pas là, et représente parfaitement la tenue d’un haut-gradé. Vous voulez que je vous dise ? Les postures qu’il a adopté m’a fait penser aux attitudes habitées de prestance qui caractérisaient le Général de Gaulle… Après j’avoue que Jean Reno a une forme de maladresse qui convient bien à celle qui peut être ressentie lorsqu’on est confronté à des différences culturelles notables provoquées par l’arrivée de jeunes américains. Il y a bien quelques petites choses qui me gênent, comme le fait que Rawlings dispose de son avion comme il l’entend. Mais après tout, pourquoi pas ? Ca a le mérite au moins d’apporter un peu de fun. Non, "Flyboys" n’est pas un chef-d’œuvre, mais il reste visuellement agréable à regarder, et prenez-le comme un film de guerre, et non comme un film historique.