"Frankenstein", c'est vraiment quelque chose de fort, tant au cinéma qu'en littérature. Forcément qu'au cinéma, ce n'est pas toujours bon, mais en grande majorité, c'est de bonne facture ( à ce que j'ai pu en lire pour l'instant, je tiens à le préciser ). Il est donc temps pour nous de nous engager, après avoir évoqué la majeure partie des Dracula de la Hammer, et dans l'attente de me procurer ceux de la Universal insessament sous peu, dans les "Frankenstein" de la Universal, et du cinéma en général. Avant de commencer plus en avant mon analyse du film, je dois vous préciser que malgré son âge, le résultat final reste époustouflant; loin d'avoir réellement souffert de l'influence des âges, l'oeuvre marque toujours autant et parvient, surtout, à instaurer un vrai sentiment de malaise chez le spectateur, un sentiment d'effroi ( et ce malgré ses 85 ans, environ ). Je pense donc que l'on peut dire, à juste titre, que l'on tient là un véritable chef-d'oeuvre du cinéma d'épouvante. Car rare sont les métrages a avoir aussi bien vieillis. Et là, je pense surtout à cette vague de slashers survnus dans les années 70; désolé de vous dire ça les mecs, mais toutes ces efflusions de sang, et votre mise en scène clipesque et datée, toutes ces choses gâchées et hideuses ne pourront jamais ( oui, je dis bien au grand jamais ) ne serait-ce qu'espérer rivaliser avec ce métrage ci. Oui, le "Frankenstein" de 1931 est un chef-d'oeuvre indémodable, et je vais vous expliquer pourquoi. Pour commencer, l'on aura rarement vu de travail de mise en scène si bien vieillir. Et justement, l'on peut dès à présent tirer de ce constat l'idée que Whale, loin du génie de Fritz Lanf, s'avère tout de même un artiste novateur et visionnaire. Sa réalisation est efficace, réfléchie et intelligente, et même si l'on y perçoit l'évidente viellesse de l'oeuvre ( en partie dûe au noir et blanc qui l'imprègne ), elle fait également preuve d'une étonnante modernité. Comme je le disais, Whale est un visionnaire, et en tant que tel, il nous fournit un travail hors-normes. Mais ce noir est blanc que j'ai cité à l'instant ajoute énormément à l'oeuvre; cela lui confère du cachet, et un aspect très romantisme allemand qui ne peut que nous évoquer le chef-d'oeuvre de Murnau, "Nosferatu". Tiens, une adaptation de Dracula ... Les deux personnages sont définitivement intrinsèquement liés. Précision attive et injustifiée? Je ne crois pas. Le premier interprète du Dracula de la Hammer, Bella Lugosi, se chargea, quelques années plus tard, de reprendre le flambeau de Karloff dans le rôle. De même pour Christopher Lee qui, avant de connaître le personnage de Dracula, s'essaya aux traits de la créature de Frankenstein, lui même interprété par Peter Cushing, le Van Helsing des Dracula de la Hammer. Voilà, voilà. Parlons donc, à présent, de l'interprétation générale. Globalement, c'est plutôt théâtral, mais comment pourrait-on reprocher ce détail en sachant pertinnement l'âge même du métrage? La seule idée qu'il faut en tirer, c'est que c'est toujours mieux joué que "La Nuit du Loup-Garou". Et comme beaucoup doivent le savoir ( et ainsi que l'histoire l'a prouvé ), Boris Karloff campe LA meilleure créature de Frankenstein de l'histoire du cinéma. Désolé mon bon Christopher, mais tu n'as pas tenu la comparaison. Il a une certaine manière de jouer, une manière toute particulière de donner la vie à son personnage, un peu à la manière du savant fou, et d'y donner du sens, suivant l'exact inverse des indications de Shelley, présentes dans son livre. Arborant un indéniable charisme, Karloff ajoute, en même temps, une incroyable sensibilité à sa créature monstrueuse; il ne sera ainsi pas rare de l'apercevoir, entre deux cris et gargouillis, de le voir arborer de la tristesse sur son visage. Et voyez-vous, je pense que l'on n'aurait pu faire pareil chef-d'oeuvre sans cet homme ci. Entre le géant démoniaque et l'enfant apeuré ( voir la scène au bord du lac pour comprendre ce que je veux dire ), cette ambiguité dans sa personnalité permet au métrage de s'étoffer d'une écriture particulière, et d'un second rôle qui, à l'étonnement de tous, prend le pas sur le personnage principal, et par delà même sur son auteure, Mary Shelley, instantannément oubliée dès lors que le film sortit. De plus, les ajouts au roman sont d'excellente facture, et contribue, à l'évidence, au succès même de l'oeuvre : la création du personnage d'Igor ( nommé je ne sais trop comment ici ) amène de la crédibilité à l'oeuvre, et nous fournit un nouveau personnage auquel nous identifier, entre le pauvre homme naïf et le bossu de notre dame ( l'influence est évidente ). Le fait que Victor ne soit pas le méchant ( ce sera plutôt le cas d'Henry, son frère, lui même présent dans le roman ) surprend également, mais dans le bon sens : l'on peut à présent encore plus s'attacher à son personnage, et ne plus le voir comme une victime, mais bien comme un héros ( encore que l'acteur manque singulièrement de charisme ). Cela permet donc au métrage de se singulariser de l'oeuvre originale, tout en ne s'en déttachant pas trop pour n'y point perdre ses marques, et par delà même toutes ces choses caractéristiques qui ont fait son succès. Le fait que Frankenstein soit muet est encore plus efficace que de le voir réfléchir sur le principe même de la vie : il ne peut désormais plus se plaindre, et face à la haine du monde, il ne peut plus qu'être impuissant, et n'y plus pouvoir rien faire. Et justement, cela ajoute un sens au récit, sens que le roman n'avait pas, et une profonde puissance dramatique, que le roman avait tout de même, pour le coup. Ensuite, le costume de Frankenstein est véritablement grandiose et saisissant; l'on ne s'y attachera pas plus longtemps, je pense, juste le temps de dire que son aspect plastique ( ainsi que celui du film en général ) est parfait. Les effets spéciaux sont eux-mêmes vraiment impressionnants pour l'époque, d'autant plus qu'ils sont délicieusement relevés par le noir et blanc de l'oeuvre. L'oeuvre manque donc de fidélité, mais dans le bon sens; les ajouts sont intelligents, réfléchis. Pour terminer, j'aimerai conclure par Boris Karloff, et son interprétation de Frankenstein. Certes, nous l'avons déja évoqué, mais terminons tout de même sur lui. Il existe, chez lui, cette chose à la fois attirante et répulsante, cet air tantôt fascinant tantôt terrifiant, cette force physique, et par delà même cette naïveté dans le regard, qui le rend unique et prouve, en même temps, qu'il est, a été et restera à jamais, je pense, le plus grand Frankentein ( oups ) de l'histoire du cinéma, et de l'histoire en général, au cas par cas ou dans son intégralité. Fascinant. Magnifique. Incroyable. J'en reste pantois.