Schlöndorff a adapté plusieurs classiques littéraires, dont cette œuvre de Marcel Proust, et force est de constater que le résultat est assez inégal. Le film peut compter sur la très bonne interprétation d’Irons, comme souvent très convaincant et en plus assez à l’aise dans la peau de ce personnage. Face à lui, Ornella Muti trouve aussi un rôle sur mesure, avec son charme un peu vulgaire (désolé !) qui sied bien à ce personnage chic de demi-courtisane. Autour de ce duo, des seconds rôles de prestige, notamment un surprenant Alain Delon en homme surpoudré, grandiloquent et homosexuel. Sa présence apporte un peu d’excentricité à un film malheureusement très corseté. Evidemment, l’œuvre de Proust veut ça, mais ça confirme aussi que ce n’est pas l’œuvre la plus cinématographique de la littérature ! Il ne se passe pratiquement rien dans ce film lent, très démonstratif (on passe un temps fou à voir tous les tics et tocs du monde bourgeois de cette époque, ce qui a un caractère ethnographique sympathique mais pour le reste…), bavard et qui peine même à être sensuel voire érotique. Le métrage souffre clairement de son côté guindé, tant dans la réalisation, froide, presque théâtral par moment, que dans les dialogues, qui sonnent souvent très écrits, que dans les décors. Le film est beau formellement, là-dessus il n’y a rien à redire, on sent un soin particulier apporté aux costumes, à la reconstitution des intérieurs, mais il se dégage de l’ensemble un côté académique qu’accentue encore une bande son classique. Pour ma part, le film est une œuvre appliquée, mais lisse, qui s’est beaucoup trop concentrée sur la reconstitution d’époque au détriment des sentiments universels du film, de la sensualité, de l’érotisme, de la passion, de la spontaneité. C’est dommage, car les acteurs étaient tout indiqués pour leur rôle et avec des moyens limités le réalisateur fait renaître une époque avec une documentation évidente, mais l’histoire est très lente pour ce qu’elle a à raconter, et ça manque de fièvre, de passion. Ca saute aux yeux avec cette longue voix off au début du film, qui pose le caractère didactique et démonstratif du film. Ce ne sont pas les seins nus fort discrets de Muti qui suffisent à nous expliquer que nous sommes vraiment dans un film de passion amoureuse. A découvrir éventuellement, mais ce film confirme que l’univers de Proust a du mal à donner à l’écran quelque chose de passionnant. 2.5