J'ai le sentiment que les critiques presse sont passées à côté d'un scénario d'une richesse culturelle incommensurable, uniquement pcq il s'agit de Tarantino, le type qui fait des films sur des branquignols qui ont la classe malgré eux... ^^ Ne vous méprenez pas, les critiques ont tendance à l'acclamer habituellement pour ses films trash mais bourrés de références cinématographiques, cependant il est cette fois sorti de son champ habituel pour s'intéresser à l'histoire, et là, on considère le type quasiment comme un inculte qui n'avait pas sa relecture à donner ^^
Ce film témoigne pourtant d'une richesse incroyable à tous les échelons, et il appelle plusieurs niveaux d'interprétation.
Sur un plan purement cinématographique, il est parfaitement fluide, avec une BO moins présente que dans le reste de sa filmo, mais qui n'en demeure pas moins pertinente. Le ton revanchard du western est donné d'entrée avec les reprises de morceaux choisis de Morricone, hommages aux meilleurs Leone, lesquels sont habilement "remixés" à de grandes pièces du classique comme La lettre à Elise. Nous savons que le fil d'Ariane est comme toujours chez lui, la vengeance d'une femme traumatisée. La photographie est superbe et les couleurs rendent autant hommage aux films des années 40 qu'aux styles que Tarantino affectionne ou à l'humeur des personnages. Le casting est 5 étoiles et les rôles semblent spécialement écrits pour chacun des comédiens qui livrent des interprétations authentiques, une belle direction là encore de Monsieur Tarantino ! La mise en scène est toujours dynamique et immergente pour le spectateur, mais elle demeure cependant relativement classique (comparée à d'autres long-métrages du réalisateur), ce qui colle parfaitement au sujet.
Ce qui démarque ce film du reste de sa filmo d'un point de vue formel, c'est le multilinguisme et la dimension ultra-internationale du casting (quoiqu'il joue beaucoup sur les accents dans ses autres films...donc c'est déjà un travail sur la langue ^^). J'adore cette facilité avec laquelle on passe d'une langue à une autre, qui n'est pas sans rappeler les films de Polanski ou de Klapish, et tout simplement le fait qu'à l'ère d'Internet nous sommes citoyens du monde. Avant Internet et les voyages, les seuls moments durant lesquels l'Homme pouvait réaliser qu'il n'était pas si différent de ceux qu'il considère comme étrangers étaient les temps de guerre... Confronté brutalement à l'autre, le choc des cultures n'en était que plus intense, donnant lieu parfois à des revirements de situation et à des sentiments contradictoires...
Sur le fond du film, je suis littéralement époustouflée par la profondeur du propos et je suis persuadée que c'est un film qui appelle de nombreux visionnages pour arriver à saisir un maximum de messages. (Perso, c'est mon second visionnage).
Il y a de manière évidente la mise en abysme de la victoire cinématographique sur l'autoritarisme, représenté ici par le nazisme. A l'image de Shosanna qui prend sa revanche à travers son film et son cinéma, Tarantino prend ici sa revanche sur Hitler avec ses Inglourious Basterds, mais aussi sur les producteurs coincés et autoritaires qui le traitaient de réalisateur mineur ^^. Il en profite pour disséminer un hommage aux grands producteurs qui ont fondé Hollywood, à l'heure où production et distribution pouvaient encore difficilement se distinguer, rappelant au passage que le septième art a toujours été corrompu par une dimension de lucre et/ou de propagande. Néanmoins, le cinéma peut être libre dans son propos et il peut réinventer le monde s'il le souhaite, n'ayant d'autre contrainte que son imaginaire.
Le sujet du film est grave, mais il offre également l'occasion au réalisateur de nous livrer des morceaux de barbarie jouissifs, en montrant toute la cruauté dont l'homme est capable par convictions. Les scènes de castagne ne sont en plus jamais gratuites, elles apportent toujours une avancée à l'intrigue et une épaisseur aux personnages. Les dialogues sont, comme toujours chez Tarantino, remarquablement écrits et très profonds. L'on passe de la réflexion au rire en remarquant les tacles adressés aux différents esprits nationaux (genre les américains qui ne parlent aucune langue étrangère ^^).
Le vrai génie de Tarantino dans ce film, c'est de s'attaquer à un sujet incroyablement épineux et délicat car heurtant de très nombreuses sensibilités, de soulever de nombreux lièvres que l'on a aujourd'hui du mal à reconnaître (comme l'effet girouette^^), sans jamais juger ni condamner dans le propos, tout en condamnant dans les actes filmés... Il n'épargne pas non plus sa patrie en montrant qu'elle est prête à contracter avec l'ennemi si cela sert ses intérêts ^^ Au spectateur ensuite de se faire son propre avis en faisant ses propres recherches et en replongeant dans l'histoire de toutes ces histoires ^^
Et pour celui quine souhaite pas réfléchir et reconnecter ce qu'il y a entre les images et les dialogues, hé bien quoiqu'il en soit, Monsieur Tarantino lui en a encore mis plein les mirettes ^^