L'histoire raconte que M. Night Shyamalan à développée l'idée de La Jeune Fille de l'eau ( Lady in the Water ) au détour de contes qu'il inventait, tard le soir, à l'attention de ses enfants qu'il tentait d'endormir. On a envie de le croire. Cinéaste de la peur et de la foi par excellence, il configure là-dedans sans doutes ce qui s'apparente à son film le plus " personnel " à mes yeux. C'est avec le sourire des facétieux qu'il se lance et nous entraine dans l'intrépide et ubuesque narration de cette citée, sans relief, en apparence terne, ou ses habitants tous plus disparates les uns que les autres n'ont rien du modèle de cinéma de ce genre ... Le geste de Shyamalan, de les prendre en exemple, d'en faire ce qu'ils deviennent n'a encore que plus d'impact avec le temps !
Car oui franchement, mon amour pour ce film n'a pas été tout de suite de ce qui s'apparente à un coup de foudre ! Pour l'avoir rencontrer un samedi soir d'été 2006, dans un petit cinéma remplit d'ados de 14 ans dans la même stupeur que la mienne, confondant à mon plus grand désarroi ( avec une dose de recul assez drôle en vérité ) mauvais film et standards face à cette étrange comédie fantasque et fantastique, qui au contraire tente dans une jolie pirouette à surprendre et révéler toute sa force émotionnelle dans ses quelques passages de l'intime, dont son réalisateur ose en assemblée ses plus belles lignes ici. Cette scène, ou Story prend de cours ce concierge d'immeuble dans sa manière de le confondre à son passé, dans le direct qu'elle décoche avec néanmoins cette tendresse dans les mots, dans le ton, selon sa posture devant ce type qui bredouille, bafouille m'avais dans un second passage déjà vraiment marqué, ce fut encore le cas pour ce nouvel arrêt.
Son petit schéma, dans ses dessins simples, qui raconte cette petite intro est une autre de mes satisfactions confirmées. Le décalage qui suit, avec la ganache de ce type, loin des standards de beauté, qui lutte avec un monstre invisible est une autre petite décroche qui avec la connaissance de son sujet bouleverse, avec le sourire d'accord, mais dont on se souviens dans ses plus délicats instants. Cleveland Heep, homme à touts faire de ce lieu si commun arbore un petit ventre, une légère calvitie, porte des lunettes pas vraiment dans les critères de la hype, du gout et de ses évidences, il est un alter ego qui ne coche en vérité aucune des cases d'un prototype. La surprise qui émerge de sa connaissance, de ses attentions pour les autres n'en est que plus délicate et surprenante ! Le geste de Shyamalan en est lui aussi que plus fort. L'exemple fonctionne d'ailleurs pour toute la catégorie de ses protagonistes qui passent au miroir grossissant, qui se livre de suite au test du fil, là ou tout le monde se plante car aucun funambule n'émerge sans heurter le sol semble nous dire ce film ou l'originalité n'est pas là ou on elle se veut attendue !
Complètement abracadabrantesque, le scénario repose sur la maestria et le cœur à l'ouvrage de M. Night Shyamalan à vouloir tenter une approche des codes à la moulinette de ses croyances, qu'au fond, l'union fait la force, sauve des vies, loin d'un applaudimètre, loin aussi des apparences trompeuses, de quelconques attentes à dire vrai ... Rien que pour cela, je continue de m'en éprendre, inlassablement je lui reconnais des intentions fédératrices, qui génère une passion dans une fausse lecture, dans une ambiguïté tout du moins on rien ne se fige, car on le sait, toutes histoires à différentes versions.
J'ai aussi dans ma démarche très envie de saluer ses acteurs qui plongent dans ce registre si périlleux. Paul Giamatti, en particulier m'a énormément apporté en terme de sensations. Il m'a refilé ses frissons, fait vivre sa peine, son trouble parfois, comme celui qui se met de coté, qui tente de combler sa défaillance à l'aide d'entraide, de celui qui donne surtout. Sa faiblesse dans l'instant critique ( vers la fin du film ) est un pic absolu. Bryce Dallas Howard elle aussi, dans une scène ou elle témoigne de ses peurs m'a particulièrement touché. Le manque de courage qu'elle évoque, sa maladresse, les moqueries et autres apparentes fébrilités témoigne d'une marque de bravoure dans une confiance en elle même qui à tendance à mettre les bouts. La transcription dans la salle de bain, à l'aide des signes, atteste d'une image qui se love dans ma mémoire, qui va je le sais perdurer encore bien longtemps dans ce coin précis de mon esprit. Les autres aux casting ne " démérite " pas non plus. Jeffrey Wright, Bob Balaban, Sarita Choudhury ainsi que touts les autres se doivent d'être mentionnés, dans la démesure d'une telle démarche qui rassemble les différences et inscrit au fer rouge des limites chez tous, dans une unité remarquable. Oui, même chez Farber !
L'ode à la magie, au cinéma, à l'espoir est une virevolte que je continue de porter en moi devant les films de ce cinéaste que j'aime tant retrouver. De plus en plus, je continue de le dire face à des détracteurs qui le cantonne à une facette, simpliste, de maitre de l'esbrouffe sans autre teneurs. Lady in the Water est l'un long métrage des plus frappés par le manque d'empathie d'un regard qui ne cherche qu'un grandiloquant démonstratif, tant sur la forme que sur le fond quand ce dernier, lui, ne recherche que ses petites bizarreries hors des clous ... Je prend le même virage et le revendique !