Ramon Holgado est une perle. Non seulement il conduit délicatement la Mercedes de François Veber, mais surtout il sait se rendre indispensable pour tous ces petits tracas des gens de la haute : livrer un bouquet de roses à chacune des invitées décommandées au dernier moment par son irascible patron, donner des cours de ventilation à la secrétaire de celui-ci au bord de la dépression, procurer des médicaments dernier cri à sa patronne hypocondriaque, avancer de l’argent pour les petits trafics du jeune Veber, et même faire arrêter les travelos qui squattaient le parcours de leur jogging matinal.
Les concurrents de son patron l’envient, quand ils n’essaient pas de le débaucher. Ramon est si heureux qu’il n’envisage nullement de tenir la promesse qu’il a faite à sa femme, employée de maison chez les Veber, à savoir aller s’installer dans la villa qu’ils se font construire en Andalousie. Il faut dire que Ramon ne parle même pas l’espagnol. Jusqu’au jour où Veber rencontre une sorte de Bernard Tapie, beau parleur et enjôleur, avec lequel il va tout partager : affaires louches avec des milliardaires russes, cuites mondaines, goût pour les Harley-Davidson… Ramon se sent ravalé au rang… de chauffeur, et encore, quand un patron se met à la moto… Il va consacrer son temps devenu très libre à boursicoter, profitant des tuyaux volés aux nouvelles relations de son patron.
Ce film est plutôt une bonne surprise. Dans un créneau très encombré (comédie à la française basée sur l’idée du tandem improbable), il bénéficie de deux atouts qui le sortent de la masse : un rythme enlevé qui n’est pas sans rappeler les grandes comédies américaines des années 30, avec un usage de l’ellipse et une réalisation assez subtile (On ne voit jamais la maîtresse de Veber, appelée du nom de la rue où elle habite) ; un ton caustique, déjà sensible dans les scénarios écrits par Florence Quentin pour Etienne Chatiliez. Dommage que le rythme s’essouffle à la moitié du film, à partir du moment où la relation entre Ramon et Veber bascule, et que l’échange de rôles qu’ils opèrent donne lieu à une situation très prévisible.
Depardieu fait du Depardieu : odieux à souhait, bousculant tout sur son passage, il s’amuse avec son image : le voir contourner la piscine en robe de chambre et coiffé d’un bob ridicule (dédicace à Karaka…) est assez jubilatoire. Gad Elmaleh est assez sobre, trop peut-être. Coproduction oblige, le rôle de bonne espagnole de Carmen a été attribué à Valeria Golino, et son accent ibéro-italien est assez curieux… Quant à Sabine Azéma, elle est excellente dans son personnage de grande bourgeoise malade imaginaire, égocentriste et dépressive… Film sans prétention, « Olé » offre un divertissement agréable, avec une histoire bien ficelée et une réalisation assez élégante.
http://www.critiquesclunysiennes.com/