Au milieu des années 90, lorsqu'elle se lance dans la réalisation de son premier long métrage, Y aura-t-il de la neige à Noël ? (un film sans star, sur le quotidien d'une famille à la ferme), Sandrine Veysset se heurte au refus des producteurs. C'est finalement grâce à Humbert Balsan, producteur après avoir été acteur (dans Lancelot du Lac) que le film voit le jour, et connaît le succès que l'on sait. Balsan, qui produit les films suivants de la réalisatrice, met fin à ses jours le 10 février 2005. La réalisatrice, qui était alors en plein montage d'Il sera une fois, se souvient : "Ca a été si brutal, si douloureux que tout s'est figé. La peine a été grande... Le film, rendu aussi fragile qu'un radeau dans la tempête, ignoré, abandonné de la profession malgré les balises de détresse jetées aux bras de cette grande et belle famille du cinéma... Et c'est de ces chemins de traverse, longs et cabossés, que ce film, Il sera une fois... s'en retourne. Et, sans l'envie et la pérsévérance de François Cohen-Séat, pour finir le travail commencé par Humbert et le mener à bien, ce film ne serait pas !" La production du film a finalement été "reprise" par la société Art'Mell.
Sandrine Veysset revient sur la genèse de ce projet : "L'idée de ce film a commencé par une question que m'a posé un jour Sébastien Régnier, le scénariste avec qui j'ai travaillé : "Si un jour tu rencontrais une vieille femme, et que cette vieille femme c'était toi, qu'est-ce que tu lui dirais ? Sur le coup, je ne savais pas quoi dire à cette vieille dame, mais ça méritait réflexion ! Sébastien, lui, avait déjà plus qu'une idée... un scénario, que nous avons retravaillé ensemble..."
L'idée du film est particulièrement audacieuse, puisqu'il s'agit de la rencontre un petit garçon et un vieillard qui s'avère être... l'homme que ce petit garçon deviendra. Le scénariste Sébastien Régnier livre quelques pistes : "L'enfance, l'âge dit de l'insouciance... Peut-être pour la majorité des enfants, certainement pas pour tous. Certains au contraire vivent cette période dans un désarroi d'autant plus grand qu'il reste secret, enfoui en eux-mêmes, presque honteux... Pierrot fait partie de ces enfants malheureux à l'imagination maladive (ou à la lucidité trop grande ?), dont la souffrance demeure un mystère au regard des adultes. Comment avouer à sa mère qu'on vit dans l'angoisse permanente de sa disparition future, programmée inexorablement ? Et comment vivre, jouer, respirer librement dans ces conditions ? Le mal est sans remède et l'ennemi clairement ciblé: le Temps. Avec son corollaire dans la durée: la fuite du temps (...) Alors dans ce temps distordu où la marche des aiguilles ne connaît plus de loi, l'enfant perd pied, s'égare, se regrette tout petit et se rencontre vieillard... Et s'il était donné à chacun de faire une telle rencontre ?"
Pour jouer le rôle de la mère de Pierrot, Sandrine Veysset a de nouveau fait appel à Dominique Reymond, actrice qui accédà à la notoriété grâce à son rôle d'agricultrice et mère-courage dans Y aura-t-il de la neige à Noël ?, le premier long métrage de la réalisatrice en 1996. Ajoutons que la jeune Lucie Régnier jouait le rôle de la fillette dans le précédent film de Sandrine Veysset, Martha... Martha.
Avec ce quatrième long métrage, Sandrine Veysset poursuit son exploration du monde de l'enfance. Dans son premier film, Y aura-t-il de la neige à Noël ?, elle s'intéressait aux liens très forts qui unissaient une mère à ses sept enfants. Dans le suvant, Victor... pendant qu'il est trop tard, elle décrivait la relation entre un petit garçon et une prostituée, et dansMartha... Martha, son troisième opus, elle brossait le portrait d'une femme, de son compagnon et de sa fille Lise.