L'histoire d'un vieux chef op, d'une jeune chanteuse, d'un mauvais imitateur, et d'un balourd au grand coeur, d'un amoureux éconduit pas très recommandable, et bien d'autres en 1936 dans un Paris rêvé.
Dans cet inventaire, j'oublie hélas le meilleur acteur du film, Pierre Richard, absolument extraordinaire, on dirait qu'il a pris 90 ans en deux décennies, mais au moins, il ne surjoue plus, et ici, son rôle est limité au minimum, il fait le maxi. Emotion garantie.
Le deuxième gagnant est le très fort et très populeux Clovis, il transperce la toile blanche, il « est » Leibowicz. Jeune coco des grèves de 36, l'année où le monde ouvrier a cru qu'il pouvait enfin vivre et non travailler pour peanuts. Bien sûr, il est capable de jouer autre chose, mais on le sent tellement à l'aise dans ce type de personnage, qu'il faut voir le film rien que pour sa performance.
Bien sûr, il serait injuste d'oublier la jolie fille du scénario. Très expressive, un peu trop forte gueule pour faire réaliste, mais dans l'ensemble son charme charpenté fait merveille.
Mais oui, on n'oubliera pas Jugnot, Merad et le très doué Morel, mais ils sont tellement caricaturaux et attendus que le film a besoin d'eux, pas les spectateurs. Donnadieu est courageux lui aussi, qui a le rôle ingrat.
Ah oui, il y a aussi un film derrière tous ces acteurs. Surprise, par rapport à la BO où tout semble écrit, rien ne se passe comme cela. Et c'est tant mieux. Du suspense, de l'action, de l'amourette. Cependant, le rythme, l'aspect choral, les surprises bien amenées, l'aspect graphique entendu du vieux Paris, l'humour typiquement franchouillard sinon Bellevillois, tout fonctionne à merveille. Contrairement aux « Choristes », la pluralité du scénario, sinon son aspect épique, empêche de s'ennuyer ou de penser à un exercice de style.
Du côté des choses qui fâchent, la neige n'est vraiment pas indispensable quand on ne sait pas la faire ! On dirait la même catastrophe que dans « Comme les autres ». Quant au choix de Prague, les différences sautent aux yeux pour un vrai parisien habitué aux clichés de Willy Ronis, et le plan de Notre Dame n'est pas loin d'être ridicule. Comme le tout est bien empaqueté dans un graphisme maîtrisé, ça ne détruit pas l'ensemble, mais bon, ce ne devait pas être si difficile de jouer dans le vrai Paris pour ces scènes. On reconnaît Passy et Montmartre, au moins ça, c'est vrai (enfin je pense !).
Il faut souligner que la caméra est inventive, précise et souvent belle, en tout cas elle fait la part belle aux acteurs, bravo, vu le sujet.
Peut-être moins exigeant que son précédent film, donc bien plus divertissant, sinon passionnant. Le principal piège a été évité, le film n'est pas du tout miêvre ou niais, cependant, on sera plus réservé sur la ficelle « tire-larmes » qui fonctionne à plein dans certaines scènes, et dans le fim entier de toute façon. Mais quand c'est bien fait, on aurait tort de mépriser ce genre d'exercices.
Au fait, les musiques sont sympas aussi. Mais ce n'est pas un film de chansons ou une comédie musicale, loin de là.
PS : Soit je suis très bête ou très différent de la plèbe, mais je parierais que cette belle ouvrage va dépasser largement l'audience des « Choristes ».