Avis sur Supersonic Man

Juan Piquer Simon est un de ses réalisateurs éminemment sympathiques, car, s’il n’a jamais eu un talent immense, et jamais de gros budgets, il se montre toujours d’une réelle générosité dans ses films, et Supersonic Man en est un excellent exemple.
Je commence par l’interprétation. Il n’y a pas à dire, elle est laborieuse. Michael Coby est transparent. Non seulement il n’a aucun charisme, ne s’impose jamais à l’écran, mais en plus il est totalement inexpressif, en décalage complet avec le métrage dynamique, souvent caricatural et parodique. A ses cotés on ne peut pas dire que Diana Polakow soit très enthousiasmante non plus, mais elle est tout de même mieux que son acolyte. Pour ma part, le mieux vient de John Caffarel, sobre en scientifique de service, et Cameron Mitchel. Celui-ci est un méchant de pacotille, mais il semble justement conscient de ce qu’on lui demande : livrer une prestation caricaturale et décalée, qui pourra rappeler par certains aspects celle d’Andy Griffith en général Rancor dans Agent zéro zéro. Franchement ses apparitions sont très amusantes. On notera que c’est un acteur différent qui porte le costume de Supersonic Man, mais comme il est masqué, on ne peut pas juger de ses qualités.
L’histoire est classique : un super-héros, un super-méchant avec de super projets archi-clichés. Une jolie femme au milieu de tout cela, et voilà qui donne une sauce pas désagréable ma foi. Le gros point fort du film c’est de ne pas se prendre au sérieux. Si clairement le budget médiocre du film, et une certaine incompétence démultiplient son pouvoir comique, c’est à la base une réelle comédie. Très rythmé, rentrant vite dans le sujet, accumulant des gags pas toujours heureux mais bien sympathiques, des scènes d’action archaïsantes certes mais teintées d’un burlesque rafraichissant (il y a une séquence bulldozer hilarante), on ne s’ennuie jamais. Supersonic Man donne la pêche, et ce n’est pas une petite affaire pour un vieux film fauché espagnol de 1979 ! A noter quand même une fin surprenante, qui résume parfaitement le ton du métrage.
Sur la forme, Piquer Simon s’en sort bien. Franchement il arrive assez souvent à se débrouiller pour que le manque de budget ne se ressente pas trop à l’écran, et il s’avère très professionnel. La séquence dans l’usine, sur le début est notamment une belle réussite. Il y a quelques effets de style (accélération à la Benny Hill par exemple) pas toujours heureux, mais qui était assez marquant des comédies de l’époque. Il y a avait des choses similaires dans les comédies italiennes, avec Terence Hill et Bud Spencer par exemple. La photographie est un peu dépassée certes, mais coté décors il y a de bonnes choses. Plusieurs scènes m’ont surpris de ce point de vue. Franchement Supersonic Man n’est pas plus ringard que certains blockbusters de SF sorti à la même époque voir postérieurement. Bizarrement ce sont d’ailleurs les décors futuristes qui sont réussis, plus que les décors réalistes, vraiment communs et sans intérêt. Les effets spéciaux par contre je n’ose pas en parler. C’est d’une profonde médiocrité, en dépit de quelques trucages qui sortent du marasme (on notera tout de même que pour une fois le robot boite de conserve ne jette pas des lasers foireux mais du feu et c’est plutôt bien fait). Enfin la musique, décalée et terriblement kitsch, est bien présente et bien sympathique. Elle est dynamique, surprenante, à l’image du film en somme !
Franchement, Supersonic Man est un film très solide, en tenant compte évidemment de son âge et de son budget. S’il avait eu les mêmes moyens que le Superman de Donner, il n’aurait pas eu la même note. Mais soyons honnête, malgré ses lacunes formelles et ses acteurs pas top, il à un immense capital sympathie. C’est un film très généreux, qui file à cent à l’heure, ne se prend jamais la tête, et offre des gags souvent naïfs, mais qui ferait tout de même rire un mort pour certains ! C’est coloré, joyeux, burlesque, voir absurde, et même si ce n’est pas toujours voulu, quel plaisir ! Sincèrement, après avoir regardé Supersonic Man, il est difficile de ne pas avoir envie de prendre un costume de carnaval, et de sortir dans la rue jouer les héros ! Je le conseille à très haute dose pour les déprimés !