La parole à Kiju Yoshida :"Si l'État avait simplement voulu réprimer les actes politiques de l'anarchiste Ôsugi et de ses camarades, il lui aurait suffi de les arrêter et de les emprisonner. Mais, en réalité, l'État a voulu les massacrer, les anéantir totalement. Pourquoi ? Parce qu'il avait peur de la liberté d'imagination qu'ils exprimaient – une imagination destructive qui niait tous les éléments fondamentaux de l'État, mariage, famille, biens privés, etc., et finalement l'État lui-même."
De part son caractère polémique, l'exploitation d'Eros + Massacre fut chaotique. En effet, au moment de la sortie, une femme, députée à l'époque, qui avait été dans l'entourage de Sakae Ôsugi, intenta un procès à Kiju Yoshida pour violation de la vie privée et tenta d'en faire interdire la projection. Sous la pression redoublée de son distributeur, le film, d'une durée originale de 226 minutes, fut coupé à 168 minutes pour sa sortie au Japon en mars 1970. Il fut néanmoins exploité dans sa version intégrale en France.
En 1969, Eros + Massacre inaugure une trilogie où Kiju Yoshida allie la recherche formelle et une exploration successive de trois extrêmes socio-politiques du Japon au vingtième siècle : l'anarchisme, le communisme et la forte poussée du nationalisme. Tout en se penchant sur l'anarchisme japonais, le réalisateur dénonce la notion de réalité historique par une multiplication de différents points de vue, et signe une oeuvre reconnue comme un grand classique du cinéma japonais.