Un des moments forts d'Inside Deep Throat se situe à sa toute fin, lors des AVN Awards (pour Adult Video News). Pas parce qu'il entérine l'importance de l'industrie pornographique dans l'histoire de la vidéo. Mais parce que beaucoup d'acteurs/actrices présents à cette cérémonie indiquent n'avoir jamais vu le film Deep Throat.
Triste, simplement triste. Alors que le porno est aujourd'hui une norme, il est regrettable que tant de gens ayant fait fortune grâce à lui ignorent l'origine de cette libération. Car oui, le film réalisé en 1971 par Gerard Damiano fut un phénomène qui contribua à libérer la parole : autour du sexe, autour des femmes, autour de l'Art. Un débat qui agita la société américaine, déjà bien secouée par l'ère du Peace & Love et des mouvements contestataires.
Le documentaire de Fenton Bailey et Randy Barbato donne la parole à ceux qui ont créé la légende. L'équipe du film en premier lieu : G Damiano, les acteurs Linda Lovelace et Harry Reems, les assistants de production ou de réalisation. Mais également les personnalités (Larry Flint, Hugh Hefner, John Waters, Wes Craven), intellectuels (Gore Vidal) ou proches...
Un coup d'œil dans le rétro nécessaire. On ne le réalise peut-être pas assez, mais le cinéma des plaisirs charnels a eu son rôle à jouer dans un débat opposant traditionalistes et réformistes. Certains le paieront à un coût assez élevé. Poursuites judiciaires, ostracisation et oubli ; le temps n'a pas ménagé Deep Throat et ceux qui y ont participé.
Instructif, édifiant, parfois très drôle ; le film se révèle également bien plus profond sur sa réflexion à travers l'art. Deep Throat, et la pornographie au début des 70's demeurait une forme d'expression muselée et souterraine. En lui ouvrant un chemin dans les mœurs, l'art du plaisir et du système D a progressivement laissé place à une usine à coïts machinaux et ineptes.
L'interdit d'hier devient l'opportunité d'aujourd'hui. Au passage, on troquait le commerce se substitue à l'art. Il y a de quoi être un peu amer, bien que le porno conserve une dimension "woke" (éveillé socialement). Parce que finalement (et ironiquement), lui aussi a perdu son "innocence" dans la bataille. Et malheureusement, peu semblent le réaliser.