Du cinéma brut, au plus près des hommes, de leurs angoisses, de leurs névroses. Des acteurs en mode "improvisation", filmés à l'arrache. On est dans un pur produit du Nouvel Hollywood, totalement sous influence de John Cassavetes qui joue l'un des deux rôles principaux (avec l'un de ses compères de toujours, Peter Falk) et a aussi manifestement joué un rôle de Pygmalion auprès d'Elaine May, en l'orientant vers un certain mode opératoire durant le tournage et vers une certaine exigence stylistique. Une certaine liberté créatrice aussi, qui s'est heurtée à l'époque au pouvoir de la Paramount. Tourné en 1973, le film est resté longtemps en montage, objet de conflit entre la réalisatrice et le studio. Il a fini par sortir en 1976 dans une version reniée par Elaine May, laquelle devra attendre dix ans pour pouvoir montrer le "director's cut".
Au final, ce long-métrage présente les qualités et les défauts de la mouvance auquel il appartient : belle intensité nerveuse, magie réaliste de quelques moments de vie saisis sur le vif, drôles ou déchirants, grands numéros d'acteurs, mais aussi image cradingue, construction un peu foutraque, niveau inégal, quelques longueurs... La force de l'histoire et ses accents de film noir l'emportent cependant, avec une tension constante autour des questions d'amitié et de trahison.