Ce jeune homme s'attachant à un enfant délaissé et l'enlevant pour le préserver d'un avenir cruel n'est pas inventé, la réalisatrice a lu son histoire dans les faits divers. Felix, orphelin élevé par sa grand-mère, trouve le vivre et le couvert chez un couple mal assorti : Roberto, fruste, violent, se prend d'affection pour le jeune homme qui a fait de la boxe comme lui. Mercedes, quasi muette, soumise et indifférente, profondément triste, délaisse son enfant par neurasthénie. Même si ce film est composé de deux parties que tout oppose, l'émotion est présente de bout en bout. Elle ne passe pas par les dialogues, bien que ceux-ci soient présents et disent l'essentiel, mais par le comportement des personnages, à commencer par les relations entre Felix et le bébé, Chango. De petits riens, la vie d'un " père-mère " et de son enfant, mais dans chaque sourire se trouve un monde d'amour. Histoire très simple. La motivation de Felix est impérieuse : éviter à Chango d'être malheureux. Dieu merci, on échappe au cliché d'un rapprochement entre l'épouse et le jeune homme. Mais les aléas se succèdent jusqu'au paroxysme et Felix tout simplement tient sa promesse de ne pas abandonner Chango. La deuxième partie montre qu'il est bien plus difficile de survivre en ville qu'à la campagne. Buenos-Aires est impitoyable, le bruit, la circulation, la violence banalisée, la pauvreté, tout concourt à isoler les deux personnages. Cette partie offre une galerie de portraits saisissants et attachants, joués par les habitants eux-mêmes. L'apparition d'un drame plus grand encore que la violence conjugale n'est qu'à moitié surprenante dans cette ville blessée mais nous laisse abasourdis, révoltés. On ne peut reprocher à la réalisatrice cette fin. Mais il faut encaisser le choc après avoir tremblé pour l'enfant pendant une heure et demie. Maria Victoria Menis n'a pas mis de gants de velours mais ne passez pas à côté de cette magnifique histoire d'amour.