Imparfait, mais prometteur Mama d’Andy Muschietti devait le propulser dans les arcanes de l’épouvante. C’est chose faite étant donné qu’il a pu mettre en boîte le diptyque Ça, prolongeant ainsi l’espérance de vie les œuvres de Stephen King à l’écran. Malheureusement, le cinéaste argentin traine des défauts de narration, le rendant suffisamment fragile pour porter un projet qui n’a cessé d’être avorté, repoussé et malmené depuis les années 80. Christopher Nolan et sa trilogie The Dark Knight convainc cependant la Warner d’engager la production, avant que Zack Snyder vienne imposer sa patte. Mais la concurrence est rude et les Marvel de Disney poussent la Justice League droit dans le mur. Quand bien même l’homme le plus rapide de l’univers DC puisse passer au travers, il est important qu’il puisse amener avec lui tout ce qui peut être sauvé, surtout depuis l’arrivée de James Gunn, co-PDG de DC Studios. Le pari du reboot est-il payant ? La réponse n’est certainement pas un paradoxe. C’est un non.
Plus rapide que la foudre et même le temps, Barry Allen doit quand même reprendre du carburant. L’hyperactivité du civil ou du super-héros trouve tout de même son bonheur lorsqu’il débarque dans un coffee shop. Ainsi démarre l’histoire d’une longue blague de plus de deux heures, où l’humour exaspère et piétine toute tentative de réconciliation avec une ambiance outrageusement pop. Ezra Miller doit également regagner de la crédibilité sous les feux des projecteurs, afin de surmonter l’éprouvante épreuve du tribunal populaire. Pourtant, chaque blockbuster fait l’objet d’un procès et ce nouveau-né doit tenir ses promesses pour espérer survivre dans le long terme. Il est le Flash, un héros emblématique des comics qui ne s’arrête jamais de courir, si bien que le timing semble parfait pour les fans de la série qu’on lui dédie et qui vient tout juste de se terminer.
Retour au combat pour une aventure en solo, mais pas trop, où ce jeune écervelé en manque d’amour maternel refuse le deuil. Il saisit l’opportunité de traverser l’espace et le temps pour se donner une seconde chance. Les avertissements du lucide Bruce Wayne ne suffiront pas à empêcher une catastrophe qui correspond davantage à une échappatoire organisée pour une saga qui agonise. On reprend les mêmes et on recommence, un peu à la manière de Retour Vers Le Futur, que l’on cite non pas par amour, mais plutôt pour initier les nouveaux-venus. Hélas, le serpent se mord fortement la queue dans la théorie et dans son application. Les divers caméos ne rendent pas justice à une intrigue qui s’éloigne beaucoup trop de ses bases pour être crédibles. Michael Keaton n’a rien de Burtonien dans un costume allégé, où la CGI prend souvent la relève et il ne reste plus qu’Ezra Miller pour composer avec ce qu’il lui reste, entre la mentalité d’un ado et celui d’un autre ado, juste plus âgé.
S’il ne peut surnager dans ce chaos, alors rien ne peut sauver ce film de sa propre bêtise, de sa propre inertie. On invoque la nostalgie comme une roue de secours, de toute évidence fissurée avec le temps. À qui s’adresse ce film en réalité ? À personne probablement, car personne n’est réellement aux commandes d’un tel carnage qu’on n’a pas revu depuis Spider-Man : No Way Home. Les retours de Michael Shannon, Gal Gadot et Ben Affleck, Jason Momoa et Jeremy Irons n’augurent rien de bon, sachant la démarche immonde d’un studio qui emprunte des visages comme bon lui semble. Et pour le peu que Supergirl (Sasha Calle) puisse apporter, on aura le temps de méditer sur la qualité d’une marchandise qui s’effrite à vue de nez. Il suffit de repenser à un lâché de bébés numériques dans le vide pour s’apercevoir du gouffre dans lequel on s’enfonce et dans lequel nos espoirs sombrent.
À l’image d’Avengers : Endgame, ce film ne respecte pas non plus ses règles fondamentales et accuse le paradoxe temporel afin de sortir son héros d’une boucle interminable et dont on souligne encore la laideur esthétique. La vitesse n’est toujours pas domptée de manière ludique et on use plus de ralentissement que d’hypervitesse dans une narration qui s’éternise. Quoi que l’on dise, Muschietti et une armada de scénaristes voyagent dans le temps pour remodeler le Snyder-Verse, afin d’écarter les éléments perturbateurs, dont le héros du titre lui-même, face à une soi-disant renaissance d’une saga qui coure encore après des distinctions. Et la plus prestigieuse de toute pour une telle entreprise reste l’approbation du public, celui qui n’a pas encore laissé les capes et costumes dernière lui, grâce à quelques éclairs de génie dont The Flash ne fait pas partie.