Oui je sais que je suis un peu sévère avec cette notation envers ce film pourtant largement apprécié. Commençons d’abord par les points positifs. Tout d’abord la tenue de haute volée des dialogues : la langue de Shakespeare (pour la V.O.) et celle de Molière (pour la V.F.) est ici portée à son firmament, avec un vocabulaire comportant bon nombre de mots désuets, et des tournures de phrases plus guère utilisés. Force est donc de constater l’énorme contraste entre le langage utilisé aujourd’hui et celui d’antan, là où 2 lignes étaient nécessaires pour dire la même chose en 3 ou 4 mots de nos jours. Nous pouvons alors mesurer toute la poésie des mots et de leur association, ainsi que le sens qu’ils pouvaient prendre. A l’époque, nul n’était besoin de se mettre dans une rage noire pour exprimer son plus vif mécontentement, le poids des mots suffisait amplement. Autre point positif, le titre : il offre les deux fils rouges que le scénario, inspiré du roman éponyme de Jane Austen, s’efforcera de développer. Le fait que le scénario soit assez convenu peut être regrettable, mais il paraît difficile d’être créatif quand la base est une œuvre littéraire. On découvre d’entrée que les parents veulent proposer leur progéniture au mariage. Le dévolu se jette d’abord sur l’aînée de la fratrie, mais rien ne va se passer simplement. C’est ainsi que l’héroïne va donc rencontrer un personnage au caractère fort, tout du moins doté d’un orgueil qu’elle jugera insoutenable, et de préjugés insupportables. Le problème est que sur ces sentiments, elle lui ressemble comme deux gouttes d’eau… Il en résultera quelques joutes verbales délicieuses. Autre point positif, les décors et les costumes : ils nous offrent un bel outil pour nous plonger au cœur du XVIIIème siècle. Ainsi vêtus, les interprètes trouvent le ton juste jusque dans le langage corporel et les regards, offrant ainsi un nouveau point positif au film. Ma mention spéciale ira à la fois à Brenda Blethyn parfaite en femme agaçante à souhait qui veut caser sa descendance selon des critères autres que sentimentaux, et à Donald Sutherland dont son personnage ne veut rien d’autre que le bien de ses 5 filles autant que possible. Pour cela, ce dernier est prêt à aller à l’encontre des us et coutumes, mais pas de façon officielle car cela serait un parjure au "bon" fonctionnement de la vie sociale de l’époque. Dernier point positif, la très belle scène finale : on devine que le réalisateur avait hâte d’y arriver parce que… qu’est-ce qu’elle est bien filmée ! Une scène unique en son genre et qui offre une belle photographie, un cliché digne de carte de correspondance que bon nombre d’adolescent(e)s dotés de tels sentiments rêvent d’envoyer à l’élu(e) de leur cœur. Malheureusement, et c’est là que vont commencer les points négatifs, le happy end final est attendu depuis longtemps. On nous fait languir, on traite de l’orgueil, du préjugé, mais aussi d’une foule de sentiments plus ou moins liés, ce qui amène pas mal de longueurs, heureusement assez bien contrecarrées par la très bonne prestation des interprètes et une très bonne mise en scène. Il faut dire que ce genre de film ne laisse guère la place à de l’action, et nul besoin de connaître le roman éponyme pour en arriver à cette conclusion. Pour autant il ressort quand même que cette adaptation serait de qualité inférieure à celle qui avait été faite 10 ans plus tôt par Simon Langton avec le concours de Colin Firth et de Jennifer Ehle dans les rôles principaux. Le fait est que cette édition pour le grand écran semble souffrir de la comparaison avec la production pour le petit écran. Je ne connais ni cette mini-série britannique de 6 épisodes de 50mn chacun, ni le roman, mais je suis sorti de ce film édition 2005 avec un sentiment partagé, balançant entre ravissement et frustration. Quand je suis convaincu, je le sais. Mais pas ici, peut-être est-ce dû, entre autres, à une erreur de taille : quand le père descend de l’étage alors que le jour est tombé, équipé seulement d’une bougie qu’il porte fébrilement, la lumière ne vient pas de la bougie mais bel et bien d’un halo de lumière bien visible émanant d’un spot clairement dirigé sur le sommet de son crâne. Impensable pour un film de cet acabit. Alors non, je ne suis pas convaincu, et je suis dans l’incapacité de dire précisément pourquoi, mais voilà ce qui explique ma note. En conclusion, je dirai que c’est un film à voir une fois, ne serait-ce que pour ses qualités immersives apportées par les dialogues, les costumes, les décors, le jeu d’acteur, et la mise en scène. Une fois, mais pas plus, sauf pour les inconditionnels des romances joliment contées.