Un SDF qui devient policier, voilà une autoroute comique toute tracée. En humoriste expérimenté, Dupontel exploite quelques quiproquos hilarants et nous offre une satire roborative (police, justice, finance...), mais il conduit toujours le spectateur là où il s'y attend le moins. Le style Dupontel est l'esthétique de la surprise : empoigner fermement le spectateur et l’emporter dans un tourbillon frapadingue et halluciné, le surprendre constamment, par un rebondissement, par un plan inattendu ou une péripétie farcesque, invraisemblable, jusqu'à l'absurde, jusqu'à la surenchère délirante parfois, qu'importe, mais l'étonner. Voir un film de Dupontel, c'est comme faire un tour de montagnes russes, sauf que le voyage dure une heure et demie ! Comme toujours, visuellement c’est un régal. Que de trouvailles, que de plans ingénieux et surprenants, efficaces et drôles ! Mais l'artiste nourrit aussi notre réflexion : l'être et le paraître, l'exclusion... Dans ce monde aux codes truqués où tout est convenance, conventions et connivence, il faut endosser une fausse identité, paraître ce que l'on n'est pas pour devenir qui l'on est... qui l'on naît. Dans ce film, percent davantage d'émotions, de tendresse et d'optimisme que dans les autres réalisations de Dupontel et on ne le lui reprochera pas, au contraire. La famille (à reconstruire) est finalement le seul refuge dans un monde en décomposition, c'est l'œil du cyclone au milieu d'un univers déréglé prêt à exploser ou à basculer à chaque instant dans le chaos. Toutefois, Dupontel évite la satire militante, le drame social et le lacrymal facile ; en plus d'être intelligent, notre homme respecte son public. "Enfermés dehors" est - à l'image de son titre - un parfait paradoxe : un conte merveilleux mais moderne et pour adultes, un traité philosophique mais trash, un film complètement déjanté mais totalement maîtrisé. http://autopsie-du-monde.over-blog.com/article--enfermes-dehors-d-albert-dupontel-critique--41868416.html