Quand Abel Ferrara s’attaque au thriller, cela donne un objet chaud et difforme comme une patate chaude. Comme toujours, sa caméra semble émerger du caniveau, collée à la rue, il adore cette lumière crue qui écrase les visages, fait ressortir les défauts physiques (ça va, on en a tous), et traits psychologiques. Il est entouré d’un casting en béton qui rend le film beaucoup plus intéressant que qu’il ne l’est en réalité. Comme à chaque fois, il hésite entre nous raconter une histoire qui en vaille la peine, et donner libre cours à ses phantasmes,(c’est vrai, qu’ on en a tous). On retient cette perpétuelle audace qui impose un certain respect, parce que ça marche, cet aller-retour floue, et netteté de l’image, cette bande-son faite de bruit et de morceaux de musique, qui agit comme un acteur tellement il frappe fort dans les tympans. Un art du détournement qui fait ressembler ça à du réel, mêlé à du reportage, (les figurants ne jouent pas, donc ne sont pas acteurs, mais justes des quidams de New-York). Et comme toujours avec Ferrara, on aime ou on n’aime pas, moi j’aime sans plus. Le king qui donne son nom au film est assez étriqué comme personnage. C’est un caucasien qui porte le costard, écoute du Hip Hop, et règle tous les problèmes à coup de révolver. Est-il trop ou pas assez complexe, ce n’est pas à moins d’en décider, d’où vient-il? je ne sais pas. De la rue? J’ai des doutes. Une version moderne, encore une de Scarface peut-être, mais pour moi, la version ultime a déjà été pondue, par Brian de palma, et on ne peut pas ne pas y penser.