Pourquoi «Thirteen Women» (USA, 1932) de George Archainbaud, pourtant une production David O. Selznick, est-il un film médiocre ? D’abord, accordons-nous : c’est une œuvre presque objectivement mauvaise, plus certainement que n’importe quelle réalisation méconnue d’un Joseph H. Lewis. Les actrices, mal dirigées, y jouent affreusement (révélant involontairement le fait qu’elles interprètent, alors qu’elle devrait trouver une justesse pour donner corps et âme à leurs personnages) ; le montage, à de très rares exceptions, se contente de juxtaposer en raccord dans l’axe masters shots et plans tailles ; et enfin, le scénario n’a que faire d’emporter l’adhésion du spectateur, tout ce qui lui importe c’est le mysticisme de l’aventure, sans se soucier de comment on le ressent ou du moyen par lequel on y croit. Mauvais film donc, nanar, presque navet. Pourquoi ? Parce que les actrices, composant une grande partie de la distribution, malgré la beauté dont les pare la photographie, n’incarnent guère mieux que de jolis visages à l’écran. Loin de Rita Hayworth, Gene Tierney ou Jean Simmons, Archainbaud ne réussit pas à leur accorder de profondeur ni ne permet que leurs corps soit plus qu’une image de lumière, mais un fantasme ou un frisson. Parce que le scénario, s’écartant de la rituelle dramaturgie hollywoodienne, ne dispose rien pour tendre le drame, pour que le spectateur se prenne d’affection pour un personnage. Le défaut fondamental de «Thirteen Women» tient peut-être à ce que le récit n’est pas assez hitchockien. Pourtant le film ne manque pas de scènes efficaces, comme celle d’ouverture où des deux trapézistes, une meurt en échouant son saut périlleux. De même la scène finale, qui voit grossir du fond du plan la tête d’un astrologue, à la manière de Méliès, réussit son « petit effet ». Mais tout se réduit à juxtaposer petit effet sur petit effet, sans jamais que l’ensemble ne soit supérieur à cette somme.