Evidemment on pense qu'il faut écrire une critique de ce type de film avec des pincettes. En fait c'est tout le contraire, c'est absolument parfait dans son genre. Pas de provocation, pas de néo-quoique ce soit, et le luxe d'une interview à la fin du film qui remet les choses un peu à leur place.
C'est très "politiquement correct", dans le sens d'un apaisement et non d'un travestissement.
Evidemment, on est très proche de Hitler et de son entourage, on a l'impression de partager son repas tellement tout semble naturel (si si, ce sont des êtres humains avec des estomacs, des bouches et des besoins) et oui, montrer la monstruosité sans le spectaculaire tendance Hollywood est finalement plus impressionnant.
Et de la monstruosité, il y en a, dans les propos du Führer, dans les traversées de rues, dans la scène des enfants de Goebbels (assez insoutenable pour toutes les femmes dans la salle), et dans les opérations à sang ouvert des blessés de l'avancée russe. Sans parler des suicides à la chaîne.
Le film (car ce n'est pas un documentaire), montre bien l'aveuglement par isolement de toute l'équipe du bunker, et sa grande qualité est de montrer le retour au réel, après la mort du commandant en chef, de tout son staff. Car oui, la vie continue, dans le bazar qu'était la conquête russe. Les mauvais, comme les bons, trouvèrent souvent une échappatoire, parce que l'instinct de survie sera manifestement toujours plus fort que la mauvaise conscience, et que juger des millions d'allemands aurait posé des problèmes matériels bien loin de l'idéal romantique de la justice.
Le film a en fait de très grandes qualités cinématographiques, et d'intéressantes modalités de représentation de la fin du nazisme (et non de la chute, assez mauvais titre).
On y voit notamment une organisation hiérarchique allemande vraiment incroyable, même quand tout est perdu, que seuls les Anglais et les Romains ont du surpasser dans l'histoire militaire, heureusement dans des buts moins génocidaires.
Historiquement, c'est peut-être loin de la vérité, mais pour le spectateur, il n'y a aucune polémique, on en prend plein la figure. Et on est devenu depuis longtemps adulte pour ne pas s'attendre à voir un monstre avec des canines de Doberman, aux yeux injectés de sang, le cinéma européen a grandi, loin des représentations caricaturales et religieuses du bien et du mal hollywoodien, ce qui nous permet de mieux appréhender les vrais dangers, toujours plus subtils.