Parmi ce paysage horrifique où Hollywood règne en maître (mais pas forcément dans les meilleurs conditions, nous gavant de suites, remakes et reboots à outrance), il arrive que d’autres nationalités s’essayent au genre. Et arrivent à faire parler d’eux, malgré la promotion virulente des produits américains. Ici, c’est un Britannique qui, pour son tout premier long-métrage, se lance dans le cinéma d’horreur. Avec, dans le rôle principal, Franka Potente. La comédienne connue pour avoir parcouru des kilomètres en courant (Cours, Lola, cours) et été la petite amie de Jason Bourne / Matt Damon (La Mémoire dans la Peau et La Mort dans la Peau). Ce film arrive-t-il à surpasser les nanars hollywoodiens ?
Sortant tout juste d’une soirée arrosée, Kate (Franka Potente) s’endort sur le quai du métro londonien. À son réveil, celui-ci est désert et fermé au public. Affolée, elle décide d’arpenter chaque station afin de trouver une sortie. Mais quelque chose, tapis dans l’ombre, se met à la traquer. Elle, ainsi que les pauvres SDF et malheureuses personnes qui, comme Kate, se sont assoupis sur le quai. Qui, s’ils n’arrivent pas à fuir cette menace, risquent d’y laisser leur peau.
Le truc avec les films d’horreur, c’est qu’il faut éviter d’attendre quelque chose du scénario. Parce qu’en général, vous risqueriez d’être déçus. En même temps, avec un script travaillé, vous n’auriez pas des personnages aussi stupides qui agissent bizarrement (comme la fameuse fille fuyant un tueur en montant à l’étage de la maison). Ni les péripéties que cela entraîne. Creep n’échappe pas à la règle, nous offrant une bien belle brochette de protagonistes aussi bêtes que leurs pieds (même si les comédiens de ce film font ce qu’ils peuvent pour être crédibles), notamment l’héroïne : alors qu’elle a de quoi mettre fin à ce cauchemar en éliminant la chose qui la pourchasse, elle laisse tomber l’arme et prend plutôt ses jambes à son coup (et cela au moins 3-4 fois dans le film). Alors, si vous regardez un tel divertissement pour ça, passez votre chemin ! Car le plus important dans un véritable film d’horreur, c’est l’ambiance !
Et sur ce point, Creep nous scotche littéralement, et ce dès les premières minutes ! Brillante idée que de prendre un réseau de métro (en fonction ou bien abandonné) comme lieu d’action. En effet, le réalisateur s’amuse à titiller notre adrénaline dans des espaces confinés (souvent de longs couloirs / tunnels) et sombres voire glauques (un peu comme les décors poisseux de la saga Saw). Le tout superbement mise en scène, le cinéaste arrivant à nous effrayer par des plans bien pensés. Et basant l’effroi spécialement sur la suggestion. Et pour cause, aucun meurtre n’est montré (juste les séquelles sur les victimes), nous ne voyons pas le « tueur », les effets sonores sont énormément mis en valeur et sans jamais abuser d’une musique qui aurait gâché l’atmosphère diablement oppressante de ce film… Ce qui aurait permis à Creep d’être l’un des meilleurs divertissements horrifiques de ces dernières années ! S’il s’était contenté de sa première moitié…
Vers le milieu du film, tous les atouts mis en place disparaissent d’un coup, pour laisser place à un long-métrage qui surfe sur les défauts et le classicisme du genre. Et cela, nous le devons à une erreur monumentale du scénario qui fait fit de la suggestion qui faisait pourtant le moteur de Creep : la révélation du « tueur » ! Une sorte de croquemitaine sorti d’on ne sait où et qui manque incroyablement de charisme à ne pas avoir d’histoire. D’accord, même sur ce point, le réalisateur à voulu pousser à fond la suggestion, via certains détails comme une photo ou un décor (s’agit-il d’une expérience qui a mal tourné ? d’un enfant né malformé ? d’un savant fou ?). Mais dans de telles circonstances, on nous impose une créature informe qui tue pour X raison. Pour se nourrir ? C’est ce que l’on pourrait croire jusqu’à la scène de « l’opération ».
D’ailleurs, cette dernière vous fera penser à la saga Saw, tant c’est dégoûtant à souhait. Et si je vous parle de cette séquence en particulier, c’est pour vous montrer à quel point le scénario a changé en cours de route. Alors qu’au début, rien n’était montré, dès l’apparition physique du tueur à l’écran, Creep se transforme en une sorte de survivor gore qui ne peut encore compter que sur quelques prouesses de mises en scène. Et ça plante un talon aiguille dans un œil ! Et ça transperce un vagin à la scie ! Et ça gicle et tout ! Comme si nous avions deux films inégaux en un. Adieu la suggestion et l’angoisse, bonjour le sang et le mauvais goût !
Et c’est à cause de sa seconde partie que Creep perd tout son charme ! Ne faisant plus angoisser comme pour la première moitié. Du coup, nous avons l’impression de n’avoir en face qu’un divertissement horrifique de plus, même si ses atouts techniques lui permettent de se placer bien au-dessus des navets hollywoodiens de ces dernières années. En arrivant même à donner la phobie du métro, c’est pour dire ! Idéal pour une soirée entre potes et pour vous donnez des frissons quelques instants. Mais certainement pas le film d’horreur le plus mémorable.