Entre les murs est un film qui m'a beaucoup irrité sur de nombreux points. D'une part, car l'ambiance dans ce collège de ZEP m'a rappelé mon adolescence et le genre d'élèves insupportables au quotidien. D'autre part, parce que le film semble mettre en avant et valoriser à travers son personnage principal une pédagogie absurde et sans arrêt à côté de la plaque.
Tout d'abord, pour avoir grandi dans un collège sensible, le discours angélique selon lequel les enfants qui sont turbulents sont en réalité des incompris à tendance à m'énerver car il faut rappeler qu'en-dehors de la classe, certains d'entre eux malmenaient carrément les autres élèves.
Mais c'est surtout l'attitude de François Bégaudeau (ou François Martin, le nom de son personnage dans le film, mais on peut considérer que c'est la même personne) qui énerve. Il est exaspérant. À noter en premier lieu que ce film est un sacré egotrip. Si la réalisation est signée Laurent Cantet, le scénario est de François Bégaudeau, d'après un livre de François Bégaudeau, avec François Bégaudeau dans le rôle principal. Son personnage de professeur désintéressé et bienveillant frôle le cliché. Mais ce sont surtout ces méthodes pédagogiques qui sont affligeantes, dont le film fait pourtant l'éloge. Il est laxiste (pour ne pas dire démago) la quasi-totalité du temps alors qu'il lui faudrait faire preuve de plus d'austérité et les quelques rares fois où il faudrait qu'il relâche la pression, il montre pour le coup un visage complètement hermétique. Ça n'a aucun sens. Il cherche à s'immiscer dans les relations entre ses élèves alors que ça ne le regarde pas.
Lorsqu'en heure de vie de classe, un élève tient des propos borderlines (à la limite du racisme), il ne dit rien ; et lorsqu'un autre élève se plaint du manque de tolérance qu'il subit à cause de son look, au lieu de le soutenir, il cherche la petite bête dans sa plainte pour montrer un incohérence dans son propos.
C'est n'importe quoi. Et c'est particulièrement frustrant d'être pendant plus de deux heures devant un film qui fait l'éloge de tout ce qu'il ne faudrait pas faire.
Il y a quelques rares points à sauver toutefois à travers lesquels les enseignants se reconnaîtront dans le film. Comme par exemple, l'incapacité (certes un peu caricaturale) du chef d'établissement à prendre des décisions et qui ne sert à rien (espérons que tous les chefs d'établissement ne sont pas comme ça) ou encore les parents d'élève qui en cas d'incident remettent d'abord en cause les méthodes pédagogiques de l'enseignant plutôt que le comportement des élèves (puisque cela reviendrait à remettre en cause la façon dont eux, élèvent leurs propres enfants).
Le film montre aussi certaines réalités dont il faudrait clairement être conscient lorsque l'on jette l'opprobre sur la fonction enseignante. Notamment le fait que l'on demande aux enseignants de faire preuve de plus d'autorité face à des élèves qui la rejette de plus en plus et mettent la responsabilité de leurs échecs sur leurs dos (bref, un comportement de « client »). Malheureusement, ces quelques points plutôt pertinents sont contrebalancés par des discours particulièrement niais.
Les dernières scènes (de joie partagée à l'approche des vacances) sont très mièvres.
De la même manière, si le film semble faire l'éloge de la manière d'enseigner de François Bégaudeau (c'est lui qu'on suit et pour qui on a de l'empathie, au final il reste très apprécié de ses élèves, …), le film permettrait une éventuelle lecture inverse.
Après tout, c'est dans sa classe qu'arrivent les problèmes et il en est clairement responsable
. Ses collègues ne sont pas dépeints sous un jour antipathique, on les montre même très solidaires (là où lui, la joue individuel pour ce qui est d'établir des règles de tenue en classe communes à tous les profs). Mais j'ai bien peur que cette deuxième lecture ne soit pas volontaire de la part du réalisateur.
Bref, malgré quelques points positifs, le film loue des méthodes pédagogiques absolument contre-productives.